BOURRON
Extraits de la monographie
d'Anselme Isidore Lenoble (1888)


Anselme Isidore Lenoble, instituteur à Bourron vers la fin du dix-neuvième siècle nous a laissé un précieux document manuscrit établissant un état des lieux de la commune à son époque, ainsi que son histoire.

De savants auteurs écrivant moins agréablement que lui, mais ayant sans doute davantage de compétence diplocratique, ont émis quelques réserves d'ordre historique sur son récit !

Comme je préfère les belles légendes poétiques aux froids documents certifiés exacts par de rigides agrégés, pièces qui souvent ne résistent guère mieux à l'usure du temps et des modes, je copie fidèlement ci-après quelques pages de notre cher Anselme Isidore, dont j'aimerais qu'un internaute me déniche les dates de naissance et de décès et si possible un portrait ! Le texte complet a fait l'objet d'une publication en 1987, par l'Association des Amis de Bourron-Marlotte, sans doute encore disponible à la Mairie.

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BOURRON
par Anselme Isidore Lenoble
Bourron est bâti dans une plaine aux pieds d'une muraille de rochers et de hauteurs formant la limite sud de la magnifique forêt de Fontainebleau. Il est situé au nord du canton de Nemours dont il fait partie et à égale distance (8 kilomètres environ) de cette ville et de celle de Fontainebleau son chef lieu d'arrondissement. 24 kilomètres le séparent de Melun chef lieu du département.

Il est desservi par un bureau de postes et télégraphes et par les gares de Bourron et de Montigny sur le chemin de fer du Bourbonnais. Un embranchement de Bourron à Malesherbes relie la ligne du Bourbonnais à celle de Corbeil à Montargis et établit une communication directe avec le réseau d'Orléans.

Le territoire de Bourron comprend 1087 hectares. Il se compose de terres labourables, de pépinières, de vignes, de prairies et de bois.

Ses écarts sont peu nombreux: MARLOTTE section presque aussi importante que le chef lieu et quelques maisons isolées:

La Gare - La Villa St Léger - Le Moulin de la Fosse et un passage à niveau.

Sa longueur du nord au sud est de 3 kilomètres 6 et de l'Est à l'ouest de 4 kilomètres 1.

Il est limité, au nord, par la forêt de Fontainebleau, à l'Est, par la commune de Montigny sur Loing, au Sud-Est, par celle de La Genevraye, au Sud, par la rivière du Loing qui le sépare du territoire de Grez, à l'Ouest, par cette dernière commune et par celle de Recloses.

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D'après l'agronome Young (Voyage en France, 3ème volume p. 373 et 4ème volume p. 124), c'était, il y a un siècle, un «vilain village avec une côte roide ouverte dans les grès qui ont servi à paver le chemin».

«Bourron n'est pas aussi peu favorisé que l'a vu Young; c'est au contraire un très agréable village; du sommet de la côte dont se plaint le voyageur anglais (plateau de Bellevue) la vue embrasse une pittoresque vallée au milieu de laquelle serpente le Loing et coupée par le canal qui emprunte le nom de cette rivière. Le voisinage des bois contribue encore à l'agrément du paysage et offre au visiteur de jolies promenades»

(Dorvet : Almanach de Seine et Marne)
Les communications faciles avec Paris, la proximité de Fontainebleau, le voisinage de quelques sites les plus pittoresques de la forêt (Gorge aux Loups, Mare aux Fées, Long Rocher, Haut Mont, Rocher des Demoiselles, etc...) attirent à Bourron et plus particulièrement à Marlotte, quantité de visiteurs, de touristes, de promeneurs de tous les pays, de toutes les nationalités. Un grand nombre d'artistes peintres, hommes et femmes, viennent reproduire sur la toile les admirables sites de la belle forêt de Fontainebleau.

Beaucoup de familles riches y passent la belle saison tout entière et leur présence donne au village une gaieté, une animation qui font de Bourron-Marlotte en été, un des séjours les plus agréables. Les grandes chasses aux cerfs et aux sangliers sont encore, en hiver, un attrait pour les personnes qui disposent de loisirs.

Plusieurs artistes-peintres se sont fixés au pays et y ont acquis des propriétés. Il est facile de reconnaître leurs coquettes maisons au cachet particulier qui les distingue et aux ateliers qui y sont annexés.

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En dehors de l'hôtel de la Renaissance très bien installé et parfaitement tenu, avec jardin, bosquets, tonnelles et où l'on trouve des voitures de toutes sortes, les propriétaires de Bourron-Marlotte tiennent à la disposition des visiteurs des logements meublés qu'ils louent pendant la belle saison.

Le territoire de Bourron est entièrement compris dans la vallée du Loing. Il est situé à une altitude moyenne de 90 mètres au-dessus du niveau de la mer, à 22 minutes longitude Est et à 48 degrés 20 minutes latitude Nord.

Le terrain est accidenté; petits vallons et petits coteaux se succèdent presque sans interruption. Dans la partie sud-ouest, la pente est à peu près régulière jusqu'au niveau de la rivière; au sud-est, le terrain s'élève d'une vingtaine de mètres environ pour s'abaisser ensuite graduellement jusqu'aux prés qui bordent le cours d'eau. Dans ces prés, plusieurs sources d'eau potable sortent à fleur de terre et débitent une quantité d'eau considérable. Un lavoir y a été établi. La Ville de Paris vient d'acquérir la plupart de ces sources pour en dériver les eaux et alimenter la capitale.

Ce sont également des sources qui alimentent la pièce d'eau de Saint Léger et le canal qui entoure le Château de Bourron.

Le climat est très sain; le sol qu'on y cultive, l'air qu'on y respire, les eaux qu'on y boit, tout en un mot contribue à rendre la région saine. D'ailleurs, le genre de vie de la population, la tenue des habitations et l'application des lois élémentaires de l'hygiène sont aussi pour beaucoup dans cette constatation de la salubrité du pays, tant il est vrai qu'à mesure que l'agriculture fait des progrès, que l'aisance augmente, que l'hygiène tend à se développer, la population devient plus généralement saine.

A l'appui de ce que nous venons de dire, qu'on nous permette de donner quelques chiffres puisés dans les recensements de 1876, de 1881 et de 1886.

En 1876, sur une population de 1178 habitants, on a compté 14 octogénaires, soit 11,88 pour 1000 ;

En 1881, sur 1280 habitants, il y avait 17 octogénaires, c'est à dire 13,28 pour 1000 ;

Enfin, en 1886, sur 1283 habitants, il existait 23 octogénaires, soit 17,92 pour 1000.

Fontainebleau, dont la salubrité bien connue est due tout à la fois au voisinage de la forêt et au terrain de grès sur lequel il est bâti et qui absorbe facilement les eaux de pluie, comptait au recensement de 1881, sur une population de 9734 habitants, 159 octogénaires, c'est à dire 16,33 pour 1000.

Nous avons cru utile de donner ces chiffres, quoique, pour être concluant, c'est par âges que devrait être étudiée la mortalité d'une population quand on veut prendre idée des conditions de salubrité dans lesquelles elle se trouve.

Les maladies dominantes sont les rhumatismes, les bronchites et les pneumonies, maladies dues plutôt aux phénomènes atmosphériques qu'aux influences climatologiques.

Si quelques personnes succombent atteintes de phtisie, il faut quelquefois en attribuer la cause à l'absence de précautions dans le choix des conjoints, et puis, il faut dire qu'il y a environ 40 ans un grand nombre d'ouvriers habitant Bourron, Marlotte, Montigny se livraient au travail du grès. Tous sont morts phtisiques, léguant quelquefois à leur génération le germe du mal dont ils succombaient.

«La science a constaté, en effet, que l'impalpable pulvérin de grès qui se dégage des blocs, lorsqu'on les débite, pénètre dans les organes et peut, avec le temps, déterminer des altérations assez graves pour causer la mort. Les ouvriers qui travaillent aux carrières appellent cette affection la maladie du sable.»

*
Le gibier était, il y a quelques années, très abondant sur le territoire, voisin d'ailleurs d'une des parties les plus giboyeuses de la forêt et entouré par une agglomération de bois communaux. Cerfs, biches, chevreuils, sangliers, lièvres, lapins, perdreaux, on y trouvait tout en grande quantité. Aujourd'hui, le gibier est devenu plus rare. La forêt a d'ailleurs perdu beaucoup sous ce rapport et le nombre des chasseurs a augmenté considérablement.

Les couleuvres, les lézards et les orvets se rencontrent en grand nombre. On y trouve aussi quelques vipères.

Le recensement de 1886 nous fournir les renseignements suivants sur la population:

BOURRON, Chef-lieu, 209 maisons, 235 ménages, 750 individus

MARLOTTE hameau, 161 maisons 182 ménages 507 individus

LA GARE, maison isolée 1 maison 2 ménages 6 individus

SAINT LÉGER, maison isolée, 1 ménage, 3 individus

MOULIN de la FOSSE 1 maison, 1 ménage, 11 individus

PASSAGE à NIVEAU 1 maison, 1 ménage, 6 individus

soit un total de 374 maisons, 422 ménages, 1283 individus

Il résulte des recensements précédents que, depuis 30 ans, la population a oscillé entre 1200 et 1300 habitants.

La population est très laborieuse et essentiellement agricole. Beaucoup de familles sont alliées les unes aux autres. Point de haines invétérées; point de ces divisions profondes que l'on rencontre trop souvent dans les villages pour des jalousies mesquines, des questions d'intérêts ou des opinions différentes. On constate, au contraire, avec plaisir, qu'une certaine harmonie préside aux relations entre habitants.

NATURE DU SOL
PRINCIPAUX PRODUITS AGRICOLES
INDUSTRIE - COMMERCE
Le sol est essentiellement siliceux. À Bourron, le sous-sol est formé de sable et d'argile dont la teinte, celle de l'ocre jaune brun. C'est ce terrain que les géologues appellent le diluvium rouge.

À Malotte, le sous-sol est formé de terre à brique excellente pour les plantations d'arbres. Ces terrains très perméables à tous les agents atmosphériques sont d'une culture facile.

Le territoire de la commune de BOURRON comprend 1087 hectares au lieu de 1082 moyenne de la superficie par commune pour le département de Seine et Marne.

Cette surface peut se décomposer ainsi :

Terres arables, y compris les pépinières : 655 hectares

Prairies naturelles : 48 hectares

Prairies artificielles : 46 hectares

Vignes : 40 hectares

Bois : 277 hectares

Bâtiments, chemins, rues : 21 hectares

Total : 1087 hectares

La population étant de 1283 habitants, la densité moyenne, par kilomètre carré, est de 118 habitants au lieu de 61, densité moyenne du département de Seine et Marne, de 71 densité moyenne de la France. Cette densité moyenne considérable nous fait prévoir le grand morcellement du territoire. Les parcelles sont divisées et subdivisées et il n'est pas rare qu'une superficie de un hectare appartienne à 20 propriétaires différents. Hâtons-nous de dire que la culture diffère en tous points des contrées éloignées des villes.

Ici, peu de céréales, ce qu'il faut pour les besoins du pays, mais, en revanche, de nombreuses pépinières, des pommes de terre, des légumes frais de toutes sortes (haricots, pois, asperges etc.) destinés à l'approvisionnement des marchés de Fontainebleau.

Les fruits (cerises, prunes, poires, pommes, nèfles, fraises, framboises, etc.) sont transportés à la ville et vendus à des prix très rémunérateurs. Le chasselas est l'objet d'un soin particulier.

«Les produits du territoire sont bons; les plantes légumineuses, dit l'auteur des Essais historiques sur le Département de Seine et Marne, ainsi que les chasselas qui ne diffèrent point de ceux de Thomery, y sont cultivés avec avantage.»

Les hôtels de Fontainebleau sont en grande partie approvisionnés par les produits de Bourron. L'excellente qualité de ces produits est due à la nature du terrain, Il est vrai, mais aussi à l'intelligence des agriculteurs qui ne négligent ni les engrais, ni le bon choix des semences et qui ne ménagent ni leurs travaux, ni leur peine.

Point de grandes exploitations, beaucoup de petites, mais des terres bien cultivées, bien fumées et dans lesquelles sont appliqués les meilleurs procédés pour tirer le plus grand parti du sol. C'est la culture intensive dans toute l'acception du mot. Ici, le petit propriétaire s'enrichit par le travail et par l'économie. L'épargne est le plus souvent consacrée par lui à l'acquisition de nouvelles terres, quand l'occasion se présente.

Beaucoup de chevaux pour la culture et le transport des denrées, peu de vaches et point de moutons. Tous les engrais sont tirés de Fontainebleau, on mène les provisions, on ramène des fumiers. Beaucoup d'écuries sont affermées aux cultivateurs qui s'approvisionnent encore aux casernes de cavalerie.

Les pépinières méritent une mention spéciale. On y trouve particulièrement des plants forestiers bouleau, charmille, chêne, châtaignier, érable, acacia, aulne, frêne, hêtre, orme, etc. Quelques pépiniéristes font en outre un commerce important d'arbres fruitiers, d'arbres et d'arbrisseaux d'ornement.

Quant aux plants de pins, beaucoup de propriétaires les cultivent et vont les vendre aux marchés de Nemours, de Montereau, de Malesherbes, de Châteaulandon. Tous ces plants étant cultivés dans un terrain sablonneux, de nombreuses petites racines se développent, ce qui favorise beaucoup la reprise des arbres. Aussi les pépinières de Bourron sont bien connues et très appréciées des propriétaires et des horticulteurs.

Les pépiniéristes font des envois de plants en Picardie, en Normandie, en Champagne, en Berry, jusque dans le Languedoc. On peut évaluer à environ 100.000 francs le chiffre d'affaires des pépiniéristes réunis.

On comprend dès lors que le développement des voies de communications ait eu une influence considérable sur les destinées d'un pays dont l'exportation des produits fait toute la richesse.

Il n'y a dans la commune ni fabrique, ni usine, c'est-à-dire aucune industrie manufacturière. D'ailleurs, il n'existe pas de mine, ni de carrière sur le territoire.

Quant au commerce, il est peu important. Quelques marchands achètent en assez grande quantité, dans les marchés des environs, le beurre et les œufs qu'ils revendent à Fontainebleau, à Melun et à Thomery.

La rivière du Loing fait tourner le moulin de La Fosse très bien monté et qui paraît fort bien achalandé.

HISTOIRE DE L'ENSEIGNEMENT

Etat de l'enseignement dans la commune - délibérations - description sommaire des divers locaux successivement affectés à l'école - instituteurs qui se sont succédé dans la commune - conscrits et conjoints illettrés - certificats d'études - groupe scolaire - plan des classes - plan du 1er étage - élévation

Avant 1810, on ne trouve dans les archives communales aucune trace d'un enseignement proprement dit. Par la délibération suivante du 8 mai 1810, le Conseil Municipal nomme un instituteur et fixe la rétribution qui lui sera allouée.

«L'an mil huit cent dix, le huit mai, le Conseil municipal de Bourron rassemblé en la salle de la mairie dudit lieu composé de MM. de MONTGON, Maire - GILLET, POINSARD Jean, DELAROCHE, LEBRUN, Pierre LEBAULT, GUIOU et COLUMEAU, membres dudit Conseil, à l'effet de délibérer sur les affaires qui intéressent la commune.

Ensuite a été faite lecture d'un mémoire du sieur GUIOU , l'un des membres dudit Conseil par lequel il expose que vu le manque d'instituteur il serait dans l'intention de remplir cette place moyennant les rétributions qu'il plairait au Conseil de lui accorder et après s'être retiré.

Le Conseil considérant qu'il est utile d'avoir un instituteur dans la commune pour l'éducation de la jeunesse,

Considérant que ledit GUIOU est suffisamment instruit pour remplir cette place et qu'il n'y a rien à dire sur ses vie et m“urs,

Monsieur le Maire entendu, délibère:

1° que le dit sieur GUIOU sera reconnu instituteur de cette commune,

2° qu'il lui sera payé par les parents des enfants qui iront à son instruction par mois, savoir:

1° pour ceux depuis l'alphabet jusqu'à l'écriture cinquante centimes, ci ... 0F,50

2° pour ceux depuis l'écriture jusqu'à l'arithmétique soixante quinze centimes ...0,F75

3° et pour ceux pour ceux étant à l'arithmétique un franc ...1 F.»

Nous avons trouvé dans les archives de Lorrez le Bocage une délibération beaucoup plus explicite que la précédente. Elle fait ressortir comment les maîtres étaient rétribués, les garanties exigées d'eux, ce qu'ils enseignaient et à quelles obligations ils étaient tenus. Cette délibération ayant été appliquée à Bourron et dans les pays environnants, nous croyons devoir la reproduire.

«Aujourd'hui quinze août mil huit cent vingt six, Nous, Maire, Adjoint et membres du Conseil Municipal dudit lieu, réunis à l'hôtel de ville par autorisation de M. le Préfet, à l'effet de délibérer sur le choix et admission d'un sujet propre à remplir convenablement tant la place d'instituteur primaire, que celle de Clerc paroissial dudit lieu, deux articles ont été proposés et mis en délibération. Le premier relatif aux émoluments à fixer pour ledit instituteur - le second concernant des devoirs à remplir sous le double rapport d'instituteur et de clerc paroissial.

Article Premier
Émoluments et rétribution
1° Il sera annuellement voté au budget de la commune pour l'instituteur la somme de deux cents francs au moins et la commune se propose d'élever ce vote jusqu'à la somme de trois cents francs;

2° Il sera logé gratis dans l'Hôtel de ville et jouira du petit jardin qui en dépend,

3° Pour l'instruction de chaque enfant à l'A B C, cinquante centimes. Ceux qui commenceront à lire payeront soixante quinze centimes, jusqu'à ce qu'ils commencent à écrire. Ceux qui liront, calculeront payeront un franc seulement pour l'école du jour,

4° Les grands écoliers qui viendront à l'instruction de jour pour l'écriture et le calcul payeront également un franc.

5° Quiconque aura commencé un mois paiera la totalité dudit mois,

6° Chaque écolier apportera de quoi se chauffer.

Article deux
Obligations à remplir
1° Au moyen du vote ci-dessus, l'instituteur sera prié d'assister à tous les offices, dimanches et fêtes et d'accompagner le pasteur partout où il aura besoin de ses services de jour comme de nuit,

2° Il sera obligé de fournir un servant de messe au moins chaque jour de l'année,

3° Il fera deux fois le catéchisme par semaine,

4° Il sera obligé de sonner chaque jour l'angelus du matin, du midi et du soir, celui du matin au jour ouvrant, celui du soir à la chute du jour. Dans le cas où l'instituteur chargerait quelqu'un pour lui de sonner et de remonter l'horloge, service dont est chargé l'instituteur, il ne pourra commettre cette fonction à d'autres que sous l'agrément de M. le curé pour son suppléant. Il est entendu que l'instituteur est chargé du gouvernement de l'horloge.

5° Toutes les rétributions indiquées au tarif diocésain pour le clerc paroissial lui seront maintenues conformément audit tarif.

Et à l'instant s'est présenté Etienne Isidore Martin GARNIER, muni d'un brevet de capacité de l'Académie de Paris et d'une commission de l'instruction publique, en outre d'une autorisation pour l'enseignement primaire, plus d'une approbation de clerc paroissial, certificats de moralité, lequel, après lecture faite des conditions ci-dessus mentionnées a été accepté comme instituteur primaire et clerc paroissial de Lorrez promettant remplir ses devoirs avec zèle et fidélité ce qu'aussi ledit GARNIER a accepté et ont tous signé.

L'ESTAUDIN, curé, comme membre bénévole, DESREZ, Maire, MARC, Adjoint, GARNIER, etc...

L'ancienne maison d'école était située au centre de Bourron, elle était contiguë à la mairie et au presbytère. Ces deux édifices communaux subsistent encore avec leur affectation spéciale. Quant à la vieille maison d'école, elle est occupée aujourd'hui par le garde-champêtre de Bourron qui est en même temps concierge du poste des indigents.

Le logement de l'instituteur comprenait 5 pièces une salle à manger et une petite cuisine au rez de chaussée, 3 chambres au 1er étage. Le tout d'un aspect très peu agréable: vieille masure aux plafonds bas et au carrelage vallonné.

Une cour de 200 m2 et un jardinet de 3 ares étaient attenants. Point de préaux couverts ni de bûcher.

Quant au mobilier, il se composait de longues tables vieilles de plusieurs générations manquant de stabilité et pouvant contenir chacune une dizaine d'élèves.

La classe avait 11m25 de longueur, 5m30 de largeur et 2m80 de hauteur. La population enfantine variant de 70 à 80 élèves, c'était donc un espace moyen de 0,8 m2 par enfant. Le nombre des élèves s'étant élevé à 90, le Conseil municipal demanda la création d'un poste d'instituteur adjoint.

Par décision du 23 septembre 1882, M. le Ministre de l'instruction publique approuva la délibération en date 22 août 1882 par laquelle le Conseil départemental créait un emploi d'instituteur adjoint à l'école de garçons de BOURRON.

La construction d'une nouvelle maison d'école était indispensable. Le logement de l'Instituteur était loin convenable, il fallait deux classes, un logement pour l'adjoint,un nouveau mobilier, la cour était insuffisante, etc.

Il fut décidé, après maintes délibérations, qu'un groupe scolaire pour garçons et filles serait édifié entre Bourron et le hameau de Marlotte à égale distance des agglomérations.

Commencé en Juillet 1882, il fut terminé en 1883 et au mois d'octobre de la même année, les classes étaient ouvertes dans le nouveau local. Cette construction a été effectuée suivant les principes recommandés par les pédagogues et les hygiénistes les plus compétents. Elle comprend, pour chaque sexe, deux classes d'une hauteur de 4 mètres et d'une superficie moyenne de 60 m2, un vestiaire, une cave, une cour de 435 m2, un préau couvert de 71 m2, un bûcher, une buanderie, un jardin de 5 ares 25 centiares.

Le logement des maîtres et maîtresses est au premier étage. Il se compose de 5 pièces pour l'instituteur et de 2 pièces pour l'instituteur adjoint. La même disposition a été adoptée pour l'école des filles.

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NOMS DES INSTITUTEURS
QUI SE SONT SUCCÉDÉ DANS LA COMMUNE
Nom et Prénom
Date arrivée
Date départ
Observations
GUYOU
08/05/1810
31/12/1816
néant
PELLETIER Jacques Hippolyte
01/10/1816
04/10/1823
néant
PELLETIER Louis (frère du précéd.)
05/10/1823
26/08/1852
néant
PELLETIER Joseph Firmin (neveu du précéd.)
27/08/1852
11/09/1877
néant
PELLETIER Jacques Hippolyte
01/10/1816
04/10/1823
néant
JOMAT Léopold, Alexandre
12/09/1877
27/10/1866
néant
LENOBLE Anselme, Isidore
28/10/1886
en exercice
néant
ADJOINTS ET STAGIAIRES
DADE Ernest
01/11/1882
01/09/1883
néant
PAUPARDIN Désiré
01/09/1883
01/04/1886
néant
CHAUVEAU Rustique
01/04/1886
en exercice
néant
Si l'on compare l'instruction de nos jours à celle d'il ya cinquante ans, on est surpris des progrès accomplis et des résultats obtenus. Mais quand on considère ce qui reste à faire on comprend qu'il faut être modeste pour le passé et ambitieux pour l'avenir.

Les deux tableaux ci-dessous indiquent le nombre des illettrés, conscrits et conjoints d'après les rechercherches que nous avons faites à la mairie de Bourron.

NOMBRE DE CONSCRITS COMPLÈTEMENT ILLETTRÉS
Années
Conscrits inscrits
Ne sachant ni lire, ni écrire, ni compter
%
de 1853 à 1862
92
12
13,04
de 1863 à 1872
95
11
11,57
de 1873 à 1882
93
6
6,45
de 1883 à 1887)
51
3
5,88
D'après les tableaux de recensement des jeunes gens de Seine et Marne pendant les 3 années 1866-1868, la moyenne des illettrés est de 7,4 % pour les années 1871-1875 de 6,2 % et pour 1876-1877 de 5%_. Dans cette statistique de tous les départements de France, Seine et Marne occupe le 18e rang.
NOMBRE DE CONJOINTS SUR 100
N'AYANT PAS SIGNÉ LEUR ACTE DE MARIAGE
Années
Hommes
Femmes
Hommes et Femmes
de 1779 à 1789
74
90
82
de 1823 à 1833
45
75
60
de 1877 à 1887
4,39
7,69
6,04
En compulsant les registres de l'État-civil, lesquels remontent à 1602, nous avons constaté qu'avant 1779, la population était complètement illettrée. Çà et là quelques signatures et quelles signatures même celles des personnes constituées en dignité

En 1866, la moyenne des conjoints illettrés était pour Seine et Marne de 13,88; en 1875, de 7,14. Dans la première statistique, Seine et Marne occupe le 19e rang, dans la 2e le 16e rang.


Tableau contenant le nom des élèves
qui ont obtenu leur certificat d'études
depuis 1875 jusque 1888 inclusivement
Années
NOM et Prénoms
Position actuelle
1
1875
MAROTEAU Anatole
instituteur
-
1876
----
"
-
1877
----
"
2
1878
FROT Alphonse
cultivateur
3
--
LEBEAULT Jules
cultivateur
4
1879
PUSSARD Joseph
employé au Louvre
5
--
MAROTEAU Georges
cultivateur
6
1880
BOUILLOT Albert
élève à l'École Militaire de St Cyr
7
--
VAILLOT Henri
menuisier
1881
----
"
8
1882
PERRAULT Emile
menuisier
9
DAVOIGNEAU Raoul
cultivateur
10
--
MONIER Joseph
charpentier
11
--
DROUIN Emile
domestique
12
--
LHOMME Adolphe
"
13
--
COMBE Raphaël
jardinier
14
1883
AUBOURG René
cultivateur
15
--
PLISSON Camille;
- id -
16
--
GELÉ Armand
- id -
17
--
BARDOU Clément
épicier
18
--
VILLARD Joseph
maçon
19
--
RASSELET Joseph
épicier
20
1884
POINSARD Julien
peintre
21
1884
MAROTEAU Jules
cultivateur
22
--
HUBERT Narcisse
menuisier
23
1885
ANDREZ Georges
manouvrier
24
--
MARTIN Georges
- id -
25
--
AUGER Alfred
cultivateur
26
--
AUFORT Jean
maçon
27
--
CAUTAIN Paul
menuisier
28
--
PORTIER Georges
- id -
29
--
PARANT Narcisse
charcutier
30
1886
LEBEAULT Henri
cultivateur
31
--
HANNIQUET Ernest
Fréquente encore l'école
32
--
AUBOURG Albert
cultivateur
33
--
JOUANNEAU Félix
- id -
34
1887
DURU Jules
- id -
35
--
COMBE Georges
jardinier
36
--
LEROY Alfred
manouvrier
37
1888
POINSARD Edmond
Fréquente encore l'école
38
--
COMBE Paul
manouvrier
39
--
FRICHET Jules
Fréquente encore l'école
40
--
TILLOU Paul
- id -

HISTOIRE LOCALE
(3e partie)

vue du Chateau

Château de Bourron
vu du haut de la «montagne du roule»
Bourron, autrefois Bozon, Borron est la plus importante des communes du canton de Nemours après la ville chef-lieu de la circonscription.

Bourron paraît être le même nom que bourg, dont l'éthymologie est assez incertaine. Littré et Napoléon Landais le font venir du latin burgus fait d'un mot grec qui veut dire une tour, parce que les bourgs étaient autrefois munis de tours comme les villes fortifiées.

D'autres, comme l'indique Napoléon Landais, prétendent que bourg vient du verbe teutonique bergen, mettre à couvert (fortifier) ; on désignait par cette expression un gros village muré ou un fort de la frontière. Littré rattache le latin burgus à l'ancien haut allemand burg, lieu fortifié.

Les vieux mots Boron et Bozon paraissent venir aussi des anciens mots français bors et bos qui signifient bourg et dont le diminutif bourron veut dire cabane (dictionnaire du vieux langage de Lacombe).

Le vieux mot bos signifie aussi bois. Avant la Révolution, la paroisse Saint Sévère de Burrone dépendait de l'Archidiaconé du Gâtinais, du doyenné de Milly, de la conférence de Nemours et de l'archidiocèse de Sens. En 1772, elle comptait 130 feux et 330 communiants.

Situé dans le Gâtinais français, Bourron, sous le rapport civil, dépendait de l'élection de Melun, baillage de Moret, grenier à sel de Nemours.

Il avait son prévôt, son procureur fiscal, son notaire royal et sa poste aux chevaux. Il était régi par la coutume de Lorris-Montargis.

L'origine de Bourron est fort ancienne, son territoire était déjà habité au temps de l'invasion romaine. Des fouilles pratiquées en 1850, dans le parc du château, ont fait découvrir au milieu de restes de murailles cachées sous le sol, plusieurs pièces de monnaie à l'effigie des premiers empereurs.

En 1870, les travaux de terrassement exécutés dans la commune de Bourron annoncèrent des découvertes intéressantes.

En différents temps, on avait trouvé dans la terre des squelettes humains et des monnaies anciennes; mais, cette fois, de nouvelles curiosités attirèrent l'attention des savants. Au mois d'août, en creusant les fondations d'une maison particulière, au centre du pays, on mit à jour, avec des ossements d'hommes et d'enfants, des bois de cerf et des objets d'animaux. En déblayant le terrain pour la construction d'une nouvelle salle d'asile, on trouva presque en même temps, avec des squelettes humains, des débris de poteries, des éclats de vases ornés de stries et de dessins, un vase complet en terre cuite paraissant offrir des caractères antiques, des morceaux de fer provenant de divers instruments et un silex taillé.

Vase Bourron

Vase de Bourron après restauration
(Musée de la Préhistoire à Nemours - Document J-C. Grelier)

«Éveillés par la nouvelle de cette découverte, les archéologues vinrent visiter les lieux. Le 27 septembre 1871, un membre de la Société d'Anthropologie de Paris a fait pratiquer une fouille qui a produit, en peu d'instants, la découverte de deux squelettes nouveaux placés dans des conditions faites pour intriguer les hommes les plus compétents. Aussi, le samedi 7 octobre, M. Broca Président de la Société d'Anthropologie, vint lui-même pour reconnaître s'il n'y avait pas lieu de poser les bases d'une recherche plus méthodique et plus complète. Espérons que de nouvelles découvertes finiront par éclairer un point important de notre histoire locale.» (M. l'abbé Pougeois).

La proximité de la forêt de Fontainebleau indiquerait assez que Bourron serait antérieur à la domination romaine, les Gaulois, en effet, préféraient le voisinage des bois et des rivières, aux vastes plaines, pour asseoir leurs demeures; la situation de la localité offrait, à ses anciens, comme à ses modernes habitants des ressources de tout genre qui rendent le séjour de ce lieu à la fois plaisant et profitable.

Que la forêt, dite aujourd'hui forêt de Fontainebleau ait été fréquentée antrefois par les Gaulois, c'est ce qu'indiqueraient assez certains endroits fameux de ces bois, tel que celui d'antre des Druides.

On assure que le village de Bourron prit une physionomie nouvelle à l'époque de l'invasion des Normands, aux 8ème et 9ème siècles, qu'il se grossit alors, ainsi que d'autres endroits dans de semblables conditions, d'une population venant des rives de la Seine et fuyant devant le flot des barbares dont ils cherchaient à se séparer par des bois et des déserts étendus.

On sait que les Normands ont remonté la Seine jusqu'au-delà de Melun, pillant et incendiant tout sur leur passage. Ce n'est toutefois que 400 ans plus tard que l'on rencontre le nom d'un seigneur de Bourron, en 1220, dit Rouillard, Histoire de Melun, Berruier de Bourron, chevalier, bailli du roi de France approuve l'aumône faite au Jard, petite abbaye voisine de Melun par Jean de Vallery.

Robert de Borron, auteur du Saint Graal, ouvrage composé de 3 volumes de plus de 2000 pages compactes, restés en manuscrits jusqu'à ce jour, est né au cœur de la France, à Bourron, sur les bords de la forêt de Fontainebleau, contrairement à l'opinion d'un très éminent esprit qui avait cru devoir placer sur les confins du Suntgaw allemand, le lieu de la naissance de Robert de Borron.

M. Eugène Hucher, membre de la société archéologique du Maine, qui vient de faire paraître une édition du Saint Graal, lequel ouvrage, comme tous les romans de la Table Ronde, n'avait pas encore été publié, démontre péremptoirement que Robert de Borron, l'auteur du Saint Graal, est né au milieu de la forêt de Bière, dans la localité appelée aujourd'hui Bourron, et qui, pendant les XIIème et XIIIème siècles, s'est appelée Borrun, Borrom, Borron

St Graal

Robert de Boron - Histoire du Saint Graal
"Les preuves fournies par l'éditeur du Saint Graal, à l'appui de sa véritable découverte, sont multiples:

- d'abord la similitude du nom, similitude telle que le manuscrit de la bibliothèque nationale reproduit exactement (chose qui n'avait jamais été signalée), l'ancienne orthographe Borrum du Bourron moderne (Vol.III p. 194).

- En second lieu, l'établissement de la parenté des Borron et des célèbres des Barres d'après la presque identité des deux blasons. Si l'on consulte la remarquable étude historique et paléographique sur le rouleau mortuaire de Guillaume des Barres, comte de Rochefort grand sénéchal de Philippe-Auguste, publiée par M. Eugène Grésy, ancien président de la Section de Melun, on pourra constater par la lecture de ce savant travail, l'origine commune et la parité presque complète des armoiries des de Borron et des Seigneurs des Barres.

On comprend que Robert de Borron et non pas Borrum ou de Borons, comme l'appelaient et le désignaient à tort des manuscrits étrangers à la France, avait de puissants motifs pour composer un roman religieux; en effet, il venait de doter l'abbaye de Barbeau, près Melun, fondée en 1156, par Louis VII dit le Jeune, qui y fut inhumé en 1180, de nombreux immeubles répartis sur plus de quatre lieues de terrain.

Les Borron furent en honneur sous Philippe-Auguste. Installés à la cour de ce prince, ils occupèrent les fonctions de sergents d'armes. C'est même ce monarque qui provoqua la rédaction du célèbre épisode du Grimaud, complément nécessaire et jusqu'ici inédit du roman du Saint Graal. Grâce aux savantes recherches de M. Hucher, un point resté obscur, se trouve élucidé, celui de la patrie de Robert de Borron, auteur du roman du Saint Graal, compris dans le cycle de la Table Ronde.

Cette particularité historique constatée irréfutablement a été signalée à l'Académie des inscriptions et belles lettres. (V. Officiel de 1879). Maxime Beauvilliers (Almanach historique de Seine et Marne, année 1880 pp.143 et 144)."

Louis IX, Saint Louis, lorsqu'il venait à Fontainebleau, où existent de nombreuses preuves de ses fréquents séjours, faisait des excursions jusqu'à Bourron; au mois de février 1234, le pieux roi donna 20 sols, somme importante pour ce temps-là, à une pauvre femme pour l'aider à marier sa fille. On trouve la mention de cette générosité dans les comptes du roi, conservés à la bibliothèque du palais de Fontainebleau.

L'inventaire des anciens titres de l'abbaye du Jard (archives de Seine et Marne H 141), mentionne encore les Berruyer, Seigneurs de Bourron en 1260 et Adam de Bourron fils.

Du Cange nous donne le nom de Guillaume de Bourron, chevalier, à la date de 1266.

Les Olim (arrêts, tome premier, p. 876) citent ce village en 1271, ainsi que ceux de Recloses, Grès, Moret et Veneux-Nadon.

En 1290, un sieur Adam de Bourron, écuyer, sans doute un aïeul des Villiers de l'Isle Adam, a eu sa sépulture dans l'église de Saint Mammès près Moret.

Voici ce que la chronique nous a conservé sur ce personnage.

Un an avant sa mort, ayant été mordu par un chien enragé, Adam alla en pèlerinage à la Chapelle de Saint-Mammès, afin d'obtenir sa guérison, ce que, du reste, tous les habitants des environs faisaient habituellement car Saint Mammès était regardé comme ayant le privilège de délivrer de la terrible maladie de la rage. Le Seigneur de Bourron fut exaucé dans ses prières, mais il s'en montra peu reconnaissant.

L'année suivante, ayant eu l'occasion de passer devant la chapelle de son puissant intercesseur, Adam dit publiquement qu'il avait eu besoin de Saint Mammès, mais qu'aujourd'hui, il s'en moquait. 25

La tradition rapporte que le blasphémateur fut puni sur le champ; atteint de nouveau de la rage, il mourut presque subitement et fut inhumé dans la chapelle même de Saint Mammès.

La terre de Bourron était possédée à la fin du quatorzième siècle par messire de Villiers de l'Isle-Adam, chevalier, maître d'hôtel des rois Charles V et Charles VI, souche de l'illustre maison dont sortit Villiers de l'Isle Adam, l'immortel défenseur de Rhodes en 1522.

Des mains de cette famille, la seigneurie de Bourron est passée par mariage dans celle de Denis de Chailly, conseiller, chambellan du roi. Messire Denis, Seigneur de Chailly en Bière, Montigny sur Loing, Marlotte, Nangis et bailli de Meaux, le 23 août 1445, rendit foi et hommage au roi Charles de sa terre de Bourron, qui relevait du château de Moret (archives nationales série p.16 n° 76).

Ce seigneur vendit son domaine à Henri de Melun, vicomte de Melun, sous Charles VII.

Lorsque le dauphin, qui devint plus tard Louis XI fit son premier voyage en Flandre, il connut et prit en affection un seigneur du Brabant, nommé Olivier de Sallard, très habile à la chasse telle qu'on la pratiquait à cette époque.

Le dauphin, devenu roi, en raison des services qu'il avait reçus de Sallard, se l'attacha en qualité de grand fauconnier. D'après la tradition, ce monarque qui ne plaisantait pas en fait de désobéissance, confisqua la terre de Bourron en 1468, après l'exécution de Charles, vicomte de Melun, convaincu de haute trahison et la donna à son grand maître des chasses. (1)

(1) Dom Morin, Histoire du Gâtinais, dit que le roi acheta la terre de Bourron pour la donner à son fauconnier. Cette donation nous paraît douteuse, car, en 1480 encore, on voit Antoine de Melun, écuyer, se qualifier seigneur en partie de la vicomté de Melun et de Bourron, près Saint Mathurin de Larchant. Ces domaines furent, il est vrai, vendus ensuite sur saisie, mais nous n'avons trouvé nulle trace de confiscation, et en 1497, ils étaient achetés par Regnault du Chesnay, maître d'hôtel du roi, seigneur de Villoiseau et par Olivier de Sallard qui devint ainsi possesseur de la seigneurie de Bourron, et dut encore racheter une portion de ce domaine des héritiers d'Etienne de Villiers - (Achives de Seine et Marne E 258, 259).

Le fils d'Olivier de Sallard a succédé à son père dans sa charge de grand fauconnier, réunissant aussi les titres de conseiller et chambellan du roi, il obtint des lettres de naturalisation au mois de Juillet 1489.

Après avoir acquis la moitié de la vicomté de Melun, Olivier de Sallard fils mourut au mois de décembre 1503, laissant ses biens à Charlotte Lhuillier, sa veuve, laquelle acheta de Guillaume de Mornay le fief de la Cour, situé à Bourron (archives départementales, E,259).

Sa sœur Antoinette était religieuse à Saint Nicolas de Melun.

L'héritier de la terre de Bourron, vers 1515, Jean de Sallard, conseiller du roi, maître en la cour des comptes, marié à Jehanne le Picard de Villeron, était en même temps bailli et gouverneur de Chaumont en Bassigny (Champagne et Barrois).

A la mort de Jean de Sallard, son troisième fils François prit possession des terres et seigneuries de Bourron, Montigny, Jacqueville, Fromont, Marlotte, avec le titre de gouverneur de la ville et du château de Montargis.

François de Sallard ayant embrassé le parti de la Ligue, fut fait prisonnier au siège de Châtillon sur Loing qui appartenait à François de Coligny et que défendait Marguerite d'Ailly, sa femme, fille d'un seigneur de Picardie.

Voici comment est raconté le trait de valeur accompli par cette héroïne: les assiégeants, que commandait Sallard de Bourron, déjà maître de la ville et même de la basse-cour du château, commençaient à ne plus penser qu'au pillage, lorsque Madame de Châtillon, animée des sentiments dont son mari absent était rempli assembla autour d'elle les gens de sa milice et le peu de domestiques qui lui restaient, chargea les ligueurs et les défit entièrement. Au nombre des prisonniers qui restèrent entre ses mains, se trouva messire de Bourron (1590). Ce seigneur recouvra sa liberté à la pacification du royaume et mourut en 1598.

En 1630, un Claude de Sallard, fils de François et de Diane Clausse de Fleury en Bière, premier capitaine entretenu du seigneur de Rambure, aux gardes françaises, possédait la terre de Bourron, il était grand gruyer de la forêt de Bière. Sa sœur Elisabeth devient en 1631 abbesse de La Pommeraye.

Le dernier rejeton de cette famille Armand Henri de Sallard mourut sans enfant le 27 novembre 1676. Sa veuve, Louise Madeleine de Guigou, qui recueillit sa succession, se remaria à messire Frédéric de Béringhen, chevalier, seigneur de Langarzeau, cornette général de la cavalerie légère de France, qui prit le titre de marquis de Bourron. Il était seigneur de Jacqueville en Gâtinais, avec haute, moyenne et basse justice. Ses armes portaient d'argent à trois pals de gueules, au chef d'azur, chargé de deux mulettes d'argent.

Marie Henriette de Béringhen, fille unique des précédents épousa messire François Pierre de Varennes, seigneur de Kergoson (Bretagne) qui, après la mort de son beau-père, fut autorisé à prendre le titre de marquis de Bourron, seigneur de Jacqueville.

De cette union, est né François Frédéric de Varennes, lieutenant en la capitainerie de Fontainebleau, mort le 13 Novembre 1788, marquis de Bourron, lequel eut de son mariage avec dame Nicole Dominique Casaubon, d'origine espagnole:

1° Marie Pierre Frédéric de Varennes, mort officier supérieur au service de la France ;

2° demoiselle Adelaïde Luce Marie de Varennes de Bourron, mariée à François César de Cordebœuf Beauverger, marquis de Montgon, maréchal des camps et armées du roi. Elle est décédée à Fontainebleau le 11 avril 1859 et fut inhumée dans le caveau de sa famille à Bourron. C'est cette dame, jeune fille alors, gardée dans le château de ses ancêtres pendant le règne de la Terreur, que les cris joyeux et providentiels du postillon passant sur la route sont venus tirer de sa situation cruelle, en annonçant le prochain retour de sa mère, rendue, comme tant d'autres captifs, à la liberté et à la vie le jour de la mort de Robespierre.

La noble et charitable famille de Montgon a laissé à Bourron d'impérissables souvenirs de ses bienfaits. Elle était originaire de l'Auvergne. Montgon est en effet un manoir antique, une ruine sur la commune de Florival, arrondissement de Brioude (Haute Loire).

Le père du marquis de Montgon fut guillotiné à Arras pendant la Révolution. Il était gouverneur de la ville. Mlle Delphine, sa fille, sœur de François César de Cordebœuf Beauverger se fit religieuse. Après la Révolution, Melle Delphine et sa mère habitèrent Chaumont près de Villeneuve la Guyard (Yonne).

Dès le 13 avril 1849, M. de Montgon avait vendu sa terre et son château à M. Calixte Armand Jacques Foucher de Brandois et à Madame Marguerite Irène Séguier, son épouse, moyennant 600.000 francs.

L'agrandissement de l'église, en 1859, est dû, en grande partie, à la générosité de M. le baron de Brandois, ainsi que la construction du nouveau clocher. Ce possesseur a été, ainsi que son épouse, inhummé dans l'église; leur mémoire est restée en bénédiction dans le pays.

Ce château de Bourron est un édifice de style Louis XIII, avec deux ailes formant pavillons élevés, entouré d'eaux vives, parc bien dessiné, cour d'honneur devant, ayant son entrée principale sur la route nationale N°7 de Paris à Lyon. Il existe à la Bibliothèque Nationale (département des Estampes) une vue du château de Bourron, dessinée à la plume en 1718, et une autre dessinée par Goblain, gravée par Gossard, puis à l'eau forte par Olympe Quevedo, in 8°.

Une chapelle avait été édifiée dans les dépendances du domaine seigneurial, sous l'invocation de la Vierge, aux frais de François Frédéric de Varennes, l'un des derniers possesseurs avant la Révolution; la bénédiction eut lieu le 11 Juin 1783.

En ventose an II, le district de Nemours prescrivit la démolition du colombier à pied carré et de la porte d'entrée du château, ainsi que le comblement des fossés et contre-fossés.

En avril 1864, le château a été acquis des héritiers de Brandois, par M. le marquis de Piolenc qui lui-même le vend en 1878 à un nommé M. Fleury. Celui-ci ne le garda que peu de temps. Il avait commencé l'exploitation du parc et on prétend qu'il avait l'intention de vendre les parcelles en détail, quand M. le comte de Montesquiou-Fezensac propriétaire actuel, en fit l'acquisition.

Jusqu'en 1790, Bourron était une cure avec vicaire; actuellement c'est une simple succursale. Il y eut, dit l'auteur des Essais historiques de Seine et Marne, un accord fait, en 1223, devant Gauthier III Cornut, archevêque de Sens, entre le curé de Bourron (de Burrone) et l'abbé Guibert de Barbeau, touchant les dîmes de cette paroisse, qui avaient déjà été confirmés à cette abbaye par Pierre de Corbeil, son prédécesseur en l'année 1210.

En 1645, nous voyons un moine du Jard, près Melun, Pierre Lecomte abandonner à ce couvent la seigneurie de la Psauve, à Nangis et les dîmes de Bourron, moyennant une rente viagère de 600 francs (archives départementales de Seine et Marne, H,141). A cette époque, et depuis longtemps déjà, la paroisse et plusieurs autres du voisinage de la forêt étaient exemptes de tailles, crues et subsides, de l'ordre du Roi et en vertu de divers arrêts du conseil, notamment des années 1606 et 1641. (Archives nationales, section administrative, E,329, 162, etc.).

Bourron possédait autrefois une maladrerie qui fut réunie, en 1695, à l'Hôtel Dieu de Fontainebleau.

Il est question de Marlotte dans un titre du 29 Novembre 1308, le roi assignait devant lui à Fontainebleau le seigneur de Mercueil et Louis de Marlotte, pour apaiser leur inimitié. (archives nationales, J.J. numéros 40-48 cotes 78 et 80).

Enfin, en 1762, Melle Nicot, du Pavillon, qui possédait des biens importants dans ce hameau, ainsi qu'à Montigny et Jacqueville, les laisse à André Girard, plombier du roi (archives de Seine et Marne, B,382).

Marlotte possédait autrefois, au lieu dit les Trembleaux, un couvent de Récollets dont on voit encore quelques restes.

C'est au bas de la montagne de Bourron, au milieu de la grande route de Lyon par le Bourbonnais, qu'eut lieu le 12 mai 1771, en présence de Louis XV, du dauphin depuis Louis XVI et d'un grand nombre de personnages de distinction, l'entrevue solennelle du comte de Provence, depuis Louis XVIII, avec la princesse Louise de Savoie qu'il devait épouser.

Deux ans plus tard, (13 septembre 1773) Louis XV, accompagné de toute la famille, va recevoir, au même endroit, une princesse de Savoie et lui présente son futur époux, le comte d'Artois.

A quelque distance de là, dans la forêt de Fontainebleau, à la Croix de Saint Hérem, eut lieu, le 25 novembre 1804, la rencontre de Pie VII et de Napoléon 1er que le pape venait sacrer.

Douze ans plus tard, au même endroit, Louis XVIII reçut la princesse Caroline de Naples fiancée à son neveu le duc de Berry.

"Vansleb Michel, dominicain, célèbre orientaliste, tombé en disgrâce, est mort vicaire de Bourron le 12 Juin 1679, âgé de 43 ans. Il a sa sépulture dans l'église; son mausolée a été entièrement restauré en 1861 par le curé de Bourron, aux frais de la liste civile impériale et sous la direction de M. Champollion Figeac, bibliothécaire du palais de Fontainebleau.

"Le curé de la paroisse, M. l'abbé Pougeois, aujourd'hui curé de Moret, a publié en 1869 un livre tràs intéressant et très consciencieux sur l'orientaliste Vansleb, sa vie, sa disgrâce et ses ouvrages. (Paris, Didier in. N°482 pages)."

"Un de ses prédécesseurs, M. l'abbé Oudin, avait déjà livré à l'impression, en 1841, un manuel d'archéologie, in 8° de 250 pages avec 16 planches."

"On doit également à deux habitants de Bourron plusieurs publications qui ne manquent pas de mérite, M. Alexandre Guillemin est l'auteur d'une traduction en vers français du Cantique des Cantiques, d'un poème sur Jeanne d'Arc, M. Pierre Lachèze, de Marlotte, s'est fait connaître par quelques ouvrages dignes d'intérêt."

Henry Murger, poète et romancier, auteur de plusieurs comédies: La vie de Bohême, Le Bonhomme Jadis, le serment d'Horace, a écrit plusieurs romans: Le Sabot rouge, Les Buveurs d'eau, Dona Sirène, etc. Dans quelques uns, les scènes se passent à Marlotte où il a séjourné pendant plus de 10 années consécutives. C'est là qu'il apprit sa nomination de chevalier de la Légion d'Honneur. Jusqu'en 1887, on a pu lire sur une plaque de marbre apposée à la maison qu'il habitait près de la forêt, à l'entrée de Marlotte: «Ici habita Henry Murger».

M. et Mme Paul de Musset ont habité Bourron pendant longtemps. M. Paul de Musset a offert à l'école de garçons de Bourron un globe terrestre d'une valeur de 50 francs.

Alfred de Musset lui-même y a séjourné quelque temps. L'habitation qu'ils occupaient sur la grande route de Paris à Lyon s'appelle encore la maison de Mme de Musset.

Giuseppe Palizzi, peintre paysagiste animalier, possédait à Marlotte une maison de campagne où il passait la belle saison. Il était chevalier de la Légion d'Honneur, commandeur de la couronne d'Italie, Officier de l'ordre des S.S. Maurice et Lazare.

Italien d'origine, Palizzi, aimait passionnément la France, son frère Filippo Palizzi, directeur du musée de Naples ne put le décider à quitter la capitale pour retourner en Italie. Il est mort à Paris, théâtre de ses labeurs et de ses succès, dans les premiers jours de Janvier 1888, à l'âge de 76 ans.

Parmi les artistes peintres propriétaires habitant Bourron ou Marlotte, citons, M.M. Delors Charles Edouard, Chevalier de la Légion d'Honneur acquéreur de la maison construite, dit-on, vers 1570, par Jean Nicot l'introducteur du tabac en France et qui aurait obtenu du roi l'autorisation de prendre dans la forêt de Fontainebleau les bois nécessaires pour faire la charpente de cette maison.

Henri de Sachy, Charnay, Detti, Becker, peintres de genre.

M.M. Allongé, Kreützer, Auzende, Saunier, Antic et Cléry, paysagistes, Cicéri paysagiste et lithographe distingué, Lessore, paysagiste et peintre sur porcelaine, Olivier de Penne, et Tartarat, peintres de chasse, Ory Abel, dit Sainte Marie, paysagiste, décédé en 1886 et dans la propriété duquel on remarque une énorme cave voûtée comme une église, avec cintres de forme ogivale et qui aurait autrefois servi de chapelle.

Citons aussi les artistes peintres qui résident encore à Marlotte: M.M. Vathelin, Héseltine, et Brigot, paysagistes.

Nota Nous remarquerons dans cette énumération l'absence totale des peintres impressionnistes comme Renoir, Monet, Sisley, Cézanne, etc qui étaient venus peindre à Marlotte depuis le milieu du XIXe siècle !

Nombre d'écrivains et d'artistes qui ont séjourné plus ou moins longtemps dans la commune et dont on a gardé le souvenir

M.M. François Coppée de l'Académie Française, Théodore de Banville, Champfleury, Fauchery, Paul Dormoy, l'acteur La Fontaine, les deux frères Meynard, Berthelot, chimiste, Aulard, professeur à la Sorbonne.

M.M. Corot, Diaz, Aligny, Godefroy de Hagemann élève de Palizzi, Eugène Deshayes, Amédée Besnus, Lacroix, Jeannin, Léon Robert, Delavallée, paysagistes.

M.M. Charles Jacquet, Cognart, animaliers. Combien d'autres, dont nous n'avons plus les noms étaient attirés par le séjour agréable de Marlotte!

(Une grande partie de la notice qui précède a été publiée par l'Almanach historique de Seine et Marne en 1872 et en 1880).

*
SOUVENIRS DE L'INVASION DE 1870-1871
(D'après les notes conservées par un habitant de Bourron)
Pendant la malheureuse guerre de 1870-1871, Bourron eut à subir continuellement, pendant près de six mois, des passages et des logements de troupes allemandes. Il eut, en outre, à fournir de nombreuses réquisitions et à payer des sommes d'argent comme contributions de guerre. Le relevé officiel des frais occasionnés par l'occupation allemande pour la commune de Bourron accuse d'une dépense de 55.615 frs (cinquante cinq mille six cent quinze francs).

La première apparition des Prussiens à Bourron eut lieu le 22 septembre 1870. C'était un détachement de 550 hommes de la garde royale de Bavière qui marchait sur la Loire, après la capitulation de Sedan. Dans la montagne sableuse, la route avait été interceptée par des abattis d'arbres, par des tranchées et des barricades de pavés. Les Prussiens sommèrent les habitants de Bourron d'aller à la hâte enlever les barricades et combler les tranchées.

Les coups de crosse de fusils et de plats de sabre pleuvaient sur ces pauvres enfants de la France, que nos cruels envahisseurs obligeaient, sous peine de mort, à travailler contre leur patrie et qu'ils fusillaient s'ils osaient travailler pour elle.

La seconde invasion eut lieu le 14 septembre 1870. 5000 Prussiens de l'armée de Frédéric Charles qui marchait sur Orléans, après la honteuse capitulation de Metz et la victoire des Français à Coulmiers, s'abattent sur Bourron. C'était un mélange habilement combiné de Westphaliens, de Hessois, de Hanovriens, de Wurtemburgeois, de Sleswig-Holsteins, etc.

La première invasion n'avait été qu'une ondée, celle-ci fut un déluge. La commune fut écrasée à la fois par le nombre de ces tristes ennemis, par leurs exigences, leurs brutalités et leur rapacité. Chefs et soldats rivalisèrent d'insolences et d'odieuses vexations.

Le Général Chanzy qui commandait l'armée de la Loire, luttait avantageusement contre le prince Frédéric Charles et faisait beaucoup de mal à l'armée prussienne. Celle-ci ayant besoin de renforts, un corps de 30 à 40.000 hommes fut détaché de l'armée de siège qui bloquait Paris et se porta sur la Loire. Une portion considérable de ce détachement appartenait à l'armée royale de Prusse. Bourron fut encore envahie le 3 Janvier 1871 par 4 à 5000 de ces Prussiens commandés par le Général Koblinski, polonais de nation.

Généralement, les habitants eurent moins à se plaindre, cette fois, des brutalités et des déprédations des soldats allemands. Néanmoins, comme dans les autres invasions les maisons abandonnées de leurs habitants furent littéralement mises au pillage.

L'autorité prussienne frappait les communes de contributions exorbitantes. Bourron qui ne versa effectivement que 4000 francs était imposé à plus de 35.000 francs. Quelques communes se sont hâtées de tout payer pour se libérer et se mettre à l'abri des vexations ennemies.

Mais pour qui connaissait les Prussiens, c'était une naïve générosité, car plus on leur donnait plus on aiguillonnait leur cupidité. Les communes qui ont eu la fermeté de résister sans s'effrayer des instances de l'ennemi, ont pu sauver leurs écus, mais il faut dire aussi que le plus souvent le Maire et quelques notables étaient emmenés en prison par les Prussiens avec menaces d'être transportés en Allemagne.

C'est ainsi que le mercredi 22 février, les Prussiens stationnant à Fontainebleau viennent réclamer une somme de 7.000 francs à valoir sur une imposition de guerre de 34.000 francs mise à la charge de la commune de Bourron.

M. Guyou, Président de la Commission municipale, déclare qu'il n'a entre les mains que 1000 francs; il consent à les leur verser, mais à la condition qu'ils n'emmèneront aucun otage. Les Prussiens reçoivent cette somme et disent ensuite au Maire: "Vous allez nous suivre." M. Berger, rentier, étant venu sans défiance parler à M. Guyou fut emmené prisonnier avec lui.

M. l'abbé Pougeois, curé de Bourron et son frère aumônier de l'armée de Metz, outrés de cet acte de la barbarie prussienne, croient l'occasion favorable pour exciter le patriotisme des habitants et provoquer de leur part une protestation courageuse contre un pareil abus des droits de la guerre. L'aumônier parcourant Bourron et Marlotte fait un appel aux hommes de bonne volonté et les invite à se joindre à lui pour aller à Fontainebleau redemander à l'autorité prussienne le Maire de la commune.

En effet, vers 2 heures de l'après-midi, près d'une centaine d'hommes tant de Marlotte que de Bourron se trouvent au rendez-vous indiqué sur la place publique à Bourron et partent en corps pour Fontainebleau. Sur la route, avant d'être en vue de l'obélisque, où se trouvait un poste de sentinelles prussiennes, il se divisent par groupes de 8 et 10 et se séparent pour entrer dans la ville par différentes portes, sans exciter l'éveil des factionnaires, se donnant rendez-vous sur la place de la sous-préfecture où résidait le commandant prussien.

Otages-Bourron

Otages de Bourron à la prison de Fontainebleau en 1871

Malheureusement, ce commandant qui prenait le titre de sous-préfet était parti à Melun d'où il ne devait rentrer que le lendemain.

M.M. Pougeois et Noret membre de la commission municipale de Bourron se présentèrent chez l'adjudant M. de Bernis, qui remplaçait le sous-préfet absent, dans le but de réclamer auprès de cet officier la mise en liberté du maire de Bourron. L'officier se montra on ne peut plus poli et respectueux pour les solliciteurs, mais il déclara qu'en l'absence du sous-préfet, il n'était que le gardien des prisonniers et qu'il ne pouvait, de sa propre autorité prononcer leur mise en liberté. Il offrit aux délégués de Bourron un permis pour visiter les prisonniers, ce qu'ils firent avec empressement.

Ils trouvèrent à la prison, avec M.M. Guyou et Berger, M. Roux, président de la commission municipale de Nemours, M. Lavaurs, Maire de Montigny sur Loing.

Ils rendirent compte à M. le Maire de Bourron de leur démarche et furent heureux de féliciter tous ces prisonniers de leur patriotisme.

La démarche eut le résultat souhaité, le lendemain, au retour du sous-préfet prussien, M. Guyou fut renvoyé à Bourron. Toutefois M. Berger fut gardé en prison pendant huit jours.

Après les préliminaires de paix ratifiés le 1er mars par l'Assemblée nationale de Bordeaux, Bourron logea successivement trois détachements de troupes prussiennes se retirant vers l'est (18-19 et 22 mars 1871).

Pendant l'invasion, pour soustraire leurs animaux à la rapacité des ennemis, les habitants de Bourron et de Marlotte avaient préparé des cabanes dans les rochers de la forêt. On en construisit un certain nombre dans les bois dépendant du château, entre Bourron et Recloses; mais les plus nombreuses, les plus vastes et les mieux conditionnées se trouvaient parmi les rochers abrupts et solitaires du Long-Rocher, sur les confins de Marlotte et de Montigny.

Ces cabanes étaient solidement construites avec des arbres, des branches et du gazon et resteront probablement longtemps visibles pour la curiosité des âges à venir.

Dans les jours où l'arrivée subite des Prussiens était à craindre, les hommes, les femmes et même les jeunes filles quittaient leurs maisons avant l'aurore, partaient dans les bois avec les chevaux et les vaches. C'était une précaution nécessaire, mais fort pénible, au cœur d'un hiver des plus rigoureux.

On se souviendra longtemps à Bourron de l'invasion de 1870-1871.

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Vue du Chateau

La monographie d'Anselme Isidore Lenoble publiée en 1888 est disponible à la Mairie auprès de l'Association des Amis de Bourron-Marlotte

Apophtegme         Bourron-Marlotte