Werner Zimmermann homme de foi et pionnier de l'écologie


WERNER ZIMMERMANN
(1893-1982)
Spiritualiste, Naturiste, Écologiste


Werner Zimmermann
Spiritualiste, naturiste, abstinent, végétarien, non fumeur, dès l'adolescence, Werner Zimmermann, écrivain et conférencier suisse est considéré par les adeptes d'une vie saine, comme l'un des premiers écologistes du XXe siècle. (1)

Né à Lyss (canton de Berne), ses parents lui donnèrent, au prix de quelques sacrifices financiers, la possibilité de recevoir une formation d'instituteur, qu'il acheva en 1913.

Tout jeune, alors que ses camarades se saoulaient et couraient les filles, Werner s'intéressa aux publications et aux idées parlant de Lebensreform (réforme du mode de vie), mais aussi la Freiwirtschaft (économie libre).

Zimmermann adhéra en 1915 au « Freiland-Freigeld-Bund », association fondée à Berne pour libéraliser la possession du sol et la circulation de l'argent.

L'année suivante parut l'ouvrage de Silvio Gesell (1862-1930), Die natürliche Wirtschaftsordnung durch Freiland und Freigeld, qui donna au mouvement "libéral-socialiste" en formation son fondement théorique.


Silvio Gesell (1862-1930)
Pour résumer les idées fondamentales de L'Ordre économique naturel que Gesell exposait dans son monumental ouvrage, de quelque 400 pages, soulignons :

- celle de sol franc (Freiland), qui demande l'abolition de tous les privilèges fonciers privés et nationaux, les droits égaux de tous les hommes à la terre (sans privilège pour les anciens occupants : "nous sommes tous d'anciens occupants de la planète"), la suppression des frontières autres qu'administratives, l'accès au sol par voie de bail dont les revenus sont versés aux mères au pro rata du nombre d'enfants ("apanage des mères"), etc.

- celle de la monnaie franche (Freigeld), qui a pour ambition de fournir le fond grâce auquel la monnaie cesserait d'être une abstraction et qui propose une monnaie perdant chaque mois 0,5% de son « pouvoir de payement » initial (6% par an) afin d'exercer une pression sur la circulation monétaire : la monnaie deviendrait "périssable", l'argent ne rapporterait plus d'intérêt, se trouverait réduit au même rang que les marchandises et le travail, ce qui supprimerait spéculation boursière et manœuvres usuraires, etc. Silvio Gesell

En 1919 Zimmermann publia sa première brochure Was ist Sozialismus ?, rééditée par la suite sous le titre de Sozialismus in Freiheit, publications dans lesquelles, il présentait un plaidoyer enthousiaste pour la Freiwirtschaft, forme de "socialisme" qui, contrairement au marxisme, n'est pas opposée à la libre entreprise.

Dans le années 1930, Zimmermann fut, avec Paul Enz, à l'origine de WIR (Wirtschaftsring), initiative inspirée par les principes de Gesell et qui prospère toujours, surtout en Suisse alémanique : ce système de payement sans argent, regroupant aujourd'hui quelque 50.000 participants, a dépassé 2 milliards de francs de chiffre d'affaires en 1991.

Bouillonnant d'idées, Werner Zimmermann avait de multiples centres d'intérêt. Il voulut d'abord sortir de son pays dans lequel il se sentait à l'étroit et connaître le monde.

Lorsqu'il eut remboursé à ses parents la somme qu'ils avaient dépensée pour ses études, il lui restait quelques monnaie qu'il utilisa pour acheter un billet de bateau pour New York.


Weltwagant
De mai 1919 à l'automne 1920, ce premier grand voyage le mena, tout en gagnant sa vie comme travailleur itinérant, à travers tous les États-Unis jusqu'en Alaska. Très sûr de lui, il rencontra d'éminentes personnalités tel Edsel Ford, le fils d'Henry Ford qu'il tenta d'intéresser à ses idées de "monnaie franche" ! Il en tira un livre, Weltvagant, dont le succès fut remarquable : plus de 30.000 exemplaires vendus !

Au cours de l'hiver 1921, il tint à l'Université populaire de Berne des exposés très suivis sur l'éducation, et son livre Lichtwärts, consacré à une "éducation libératrice", atteignit en vingt ans un tirage global de 54.000 exemplaires.

En 1923, il retourna en Amérique pour un an.

Dans ses ouvrages et ses conférences, Zimmermann aborda avec la plus grande liberté les questions sexuelles, - un thème encore jugé tabou, - n'hésitant pas à évoquer très ouvertement les inhibitions personnelles qu'il eut à surmonter pour s'en libérer.

Il joua un rôle important dans le mouvement naturiste dans les années 1930. Il fut l'inspirateur de l'Organisation des naturistes de Suisse fondée par ses amis Eduard et Elsi Frankhauser. La création du centre naturiste de Thielle réalisa un de ses vieux rêves. (5).

Cinquante ans après, les écrits de Zimmermann sont toujours à l'honneur dans ces cercles.


Werner Zimmermann
De 1929 à 1931 Werner Zimmermann qui s'était fait des correspondants et des amis un peu partout, entreprit un long voyage autour du monde, qui le conduisit en Inde, en Chine et au Japon.

Plus tard, il voyagera toujours et encore, en 1949-50 puis de 1958 à 1959.

Imprégné dès l'enfance d'une foi profonde en Dieu, il fut, en grandissant, profondément déçu par l'enseignement religieux traditionnel dispensé par les Églises chrétiennes.

Au contact des autres civilisations, Zimmermann évolua dans ses croyances vers une spiritualité personnelle, s'éloignant des religions ou confessions traditionnelles, au sens usuel de ces termes.

Homme de foi, ouvert au Surnaturel, à d'autres messages, il s'intéressa aux mystiques orientales, aux enseignements parallèles, aux philosophies transcendantales.

Le cercle d'amis qui gravitent autour de Zimmermann, réunit des théosophes, des rosicruciens, des adeptes de Rudolf Steiner, d'Hossein Kazemzadeh "Iranschähr", des disciples de Baha Ullah ou des personnes se reconnaissant dans divers autres courants ésotériques. (2)


Werner Zimmermann, Eduard et Elsi Frankhauser
Ce fut dans cet esprit d'ouverture qu'il traduisit en allemand et publia, en 1938 et en 1940, les évangiles "apocryphes" modernes, L'Évangile des douze ou de la vie parfaite de Gideon Ousely et L'Évangile essénien de la Paix - d'après les anciens textes araméen et slavon d'Édmond Székely. (4)

Eduard Frankhauser publia aussi en 1942, sous le titre Die mystischen Meister, la traduction par Zimmermann du curieux livre de Brown Landone sur « les prophéties de Melchisedek dans la Grande Pyramide et les sept temples » - « un livre », commentait le magazine théosophique, qui « n'offre pratiquement rien de nouveau au connaisseur des ouvrages de H.P.B[lavatsky] », mais apporte de nombreuses confirmations de l'enseignement théosophique.

Durant les années de guerre, Zimmermann s'intéressa plus d'une fois aux prophéties : en 1944, il publia (toujours chez Frankhauser à Thielle) une brochure Friede auf Erden, dans laquelle il présentait les prédictions ayant annoncé la 2e guerre mondiale, et surtout l'ère de paix qui était supposée la suivre : l'Ère du Verseau (Das kommende Wassermann-Zeitalter).

En 1936, Zimmermann se rendit à Ommen, aux Pays-Bas, où se tenaient alors les réunions estivales de Krishnamurti, et en tira une brochure, Krishnamurti. En 1956, à Hambourg, il traduisit cinq exposés de Krishnamurti.

On lui doit également la traduction en allemand d'enseignements de « I AM » (Begegnung mit dem Meister, 1943). Sans parler d'un texte sur la vie et l'œuvre d'Edgar Cayce (1950).

Ces fréquents contacts avec les religions parallèles, les mystiques alternatives voire "sauvages" apparaissent aussi durant les voyages de Zimmermann.

Dans le récit du premier, il consacre déjà tout un chapitre à ses contacts avec des cercles spirites.

Lorsqu'il arrive à Bombay en 1950, il est accueilli chez le frère du professeur de yoga Yesudian), il visite les centres spirituels de la Mission Ramakrishna, de la Société théosophique, l'ashram d'Aurobindo, celui de Ramana Maharshi).


Sri Aurobindo
Tout à fait étonnant est son petit livre sur le Japon : non seulement il y présente des réformateurs de la pédagogie et des propagateurs du fédéralisme mondial ou s'y intéresse aux curieuses théories sur les origines hébraïques du peuple japonais, mais il consacre plusieurs chapitres à de nouvelles religions japonaises à une époque où celle-ci restaient pratiquement inconnues des Européens; on trouve des chapitres sur l'Ananai-Kyo, sur Oomoto, sur Itto-en, sur Seicho-No-I.

Il serait donc difficile d'imaginer un représentant plus complet de ce qu'on appelle le cultic milieu que Zimmermann.

Cela n'empêchait pas ce grand voyageur, cet éminent vagabond spirituel, de conserver solidement les pieds sur terre sans oublier ses racines bernoises. Il anima à plusieurs reprises des émissions radiophoniques en dialecte ; quatre de ses exposés furent publiés en 1941 sous le titre de Bärndütsch (patois allemand). Et, lorsque Zimmermann, en Inde, apprit la mort de sa mère, il écrivit, et ce n'était pas là l'expression d'un simple moment de mal du pays : « Ma patrie est là-bas dans nos montagnes, pas ici sur les rives du Gange. »

Ma mère, Frieda Höhener, séjourna à plusieurs reprises à Thielle et entretint une longue correspondance avec Zimmermann.

Sources :
  • (1) (Spuren, N°9, automne 1988, p. 103).

  • (2) (Jean-François Mayer : Les nouvelles voies spirituelles : enquête sur la religiosité parallèle en Suisse. (L'Âge d'Homme)

  • (3) Felix L. Pinkus dans l'organe théosophique Ex Oriente Lux (1943, N° 5. P. 13).

  • (4) sur les « néo-apocryphes », cf. Finger 1989.

  • (5) Eduard Frankhauser. En 1921, F. entra en contact avec le père spirituel du mouvement naturiste, Werner Zimmermann, dont il géra la maison d'édition dès 1923, avant de devenir libraire-éditeur indépendant en 1924. Il fonda en 1927 l'Organisation naturiste suisse (ONS) et sa revue Die Neue Zeit en 1928. Lors de procès spectaculaires, qu'il mena jusqu'au Tribunal fédéral, il défendit avec succès le droit à la nudité et la tolérance envers le mouvement naturiste. Président de l'ONS pendant cinquante ans, il créa seize camps naturistes, dont le plus connu est celui de Thielle. Il lança en 1961 la fondation "die Neue Zeit" pour des loisirs sains, dont il fut le secrétaire jusqu'en 1989 (président d'honneur en 1991) et qui devint après sa mort propriétaire de ses camps naturistes. Il présida en 1952 le premier Congrès mondial des naturistes à Thielle et participa à la création de la Fédération naturiste internationale.

 


Werner Zimmermann en 1930

 
Lire : Jean-François Mayer


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