Frédéric Viey
Stéphane Mallarmé
Les grandes heures de Valvins


 
Stephane Mallarme
 
Par un soir tout couleur de topaze et d'orange
Leurs espoirs reflétés dans ce riche tableau
De gais comédiens suivant le fil de l'eau
Ont débarqué la joie au seuil de votre grange

Aucun toit si grossier ne leur paraît étrange
Ils le peuvent changer vite en Eldorado
Pour peu qu'au pli naïf qui tombe du rideau
La rampe tout en feu mêle l'or d'une frange

Ainsi le doux concert qui cessa quand je vins
N'était pas, croyez-m'en, ô peuple de Valvins
Le désespoir d'un veau pleurant hors de la salle
Mais, avec ses cinq doigts, par la gamme obéis
La chanson que du creux d'un violon exhale
Un jeune homme de bien natif de ces pays.

Mallarmé à Valvins
Louis Lutrine laissa ses impressions sur Fontainebleau en cette manière : "Lorsque je m'aventure dans cette forêt, je tâche d'être à la fois un simple promeneur, un poète, un historien, un artiste, mais je ne suis pas un géomètre, un directeur du cadastre ou un inspecteur des eaux et forêts".

Mais qu'est-ce qui fascinait tant les poètes et les touristes à Valvins  ? Victor Hugo passa quelques jours aux Plâtreries et Samois, depuis 1841, avait trois endroits d'accueil entre le Petit Pont, les Plâtreries et Valvins, car l'arrivée des bateaux vapeurs pouvait capter une partie de la clientèle.

La forêt impressionnait toujours les poètes, les peintres et les musiciens qui passaient doucement du romantisme au symbolisme. Sénancourt, qui avait aimé l'Auberge de Valvins, écrivait en 1795 et l'immortalisa : "Isolé au pied d'une éminence, sur une petite plage entre la rivière et les bois".

A Valvins, Stéphane Mallarmé avait aménagé lui-même son ermitage à la mode de l'époque.

Henri Roujon nous laissa ses notes sur la Maison de Valvins : « quelques toiles de Jouy aux murs blanchis à la chaux, de bons vieux fauteuils, des livres, des amis, quelques kimonos, une pendule de Saxe digne d'un musée donnaient à cet asile champêtre une grâce d'aristocrate. »

Au début les Mallarmé étaient logés au premier étage de la modeste maison de Valvins, même s'ils étaient meublés sommairement c'était avec un goût raffiné : un bureau, un lit à baldaquin tapissé de toile de Jouy rouge, un tapis persan sur le sol carrelé et une toile de Berthe Morisot sur le mur peint à la chaux sans oublier la pendule de Saxe sur la cheminée.

Disposant d'un potager, d'un verger, d'un puits, il aimait le travail manuel qui le reposait d'autres travaux ; on pouvait le voir peindre ses chaises de jardin ou vernir son canot.

Dans une lettre à sa femme Marie et à sa fille Geneviève, il écrivait : "Tous les matins je me promène avec le sécateur et fais leur toilette aux fleurs avant la mienne ».

Il avait également embelli le dôme campagnard de Valvins de ses mains, justifiant bien cette élection propice à la fois au loisir du rameur et à son rêve de poète : de belles eaux où faire nager son canot et un site où s'allie au miroir du fleuve le reflet changeant de la forêt.

Dans cette maison de location de Valvins, Stéphane Mallarmé se reposait, écrivait à ses amis, repensait son œuvre, parcourait la forêt ou canotait sur le fleuve. Ses promenades fluviales le menaient du Pont de Valvins à l'écluse de Samois ou dans l'autre sens vers Thomery.

Valvins
Valvins par Philippe Burty

Henri Mondor relate l'anecdote suivante : "On l'a vu un jour ou deux dans la forêt, avec un bâton au bout duquel était fixé un clou. Il ramassait et jetait dans un panier les morceaux de papiers épars. Comme on s'étonnait de ses soins : "J'aurai demain Régnier et quelques amis, je prépare les lieux ».

Christian de Bartillat a écrit : "Avec Mallarmé, ses amis, ses disciples, la poésie semble sortir de la forêt de Fontainebleau et verser du côté de la Seine pour se jouer de l'eau ». Grâce à lui, le pont de Valvins, cinq fois reconstruit depuis les Romains, est devenu le haut lieu de la littérature française".

André Billy, à propos du Pont de Valvins, déclara : "il a joué dans la méditation de Mallarmé un rôle presque aussi important que son cabinet de travail ou son jardin » alors qu'Henri Mondor rappelait que c'est au Pont de Valvins que Mallarmé rencontra un baigneur qui perdant connaissance était en train de se noyer : et ce baigneur n'était autre que Paul Valéry.

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Le canot du poète : une yole

En 1885 dans une lettre à Paul Verlaine, Mallarmé s'épanchait : « J'oubliais mes fugues aussitôt que pris de trop de fatigue l'esprit, sur le bord de la Seine et de la Forêt de Fontainebleau, en un lieu le même depuis des années. »

A Valvins, Stéphane Mallarmé y pêchait également auprès de son ami Nadar et il eut pour voisins : Élémir Bourges, Henri de Régnier, Edouard Dujardin, Paul et Victor Margueritte, Odilon Redon, Camille Mauclair, Armand Point, Stuart Merrill, Gabriel Seailles, Renoir etc…

Il y recevait donc des amis arrivant de Paris ou d'alentours : Berthe Morisot et sa fille Julie Manet, Paul Valéry, Manet, Léon Dierx, Vuillard, Marcel Schwob ou les Natanson. Stéphane Mallarmé n'appelait-il pas affectueusement la femme de Thadée Natanson : "la gentille Misia" car il l'avait connu jeune fille chez son père Cyprian Godebski.

Dès que les Natanson étaient à Valvins, "tous les soirs vêtu d'une longue houppelande et chaussé de sabots en bois, une lanterne à la main, et une bonne bouteille de vin dans l'autre Mallarmé longeait le sentier boueux qui conduisait chez les Natanson pour partager un des copieux repas de Misia.

En entrant à la Grangette, il enlevait ses sabots, révélant de ravissants chaussons noirs. Il racontait des histoires pour faire rire Misia et, secoué par le rire à son tour s'exclamait : "Qu'elle est gentille !" racontent A. Gold et R. Fizdale dans leur livre sur la vie de Misia Sert. Le jour de l'an, rituellement Mallarmé offrait à Misia Natanson un éventail japonais avec une dédicace ; celui qui a survécu porte encore ces vers :

Aile que du papier repolie
Bats toute si t'initia
Naguère à l'orage et la joie
De son piano Misia.

Stéphane Mallarmé aimait l'auto-dérision, son adresse à l'auberge de Cayenne, à Valvins, en est un exemple :
Monsieur Mallarmé, le Pervers
A nous fuir pour les bois s'acharne
Ma lettre, suit sa trace vers
Valvins, par Avon, Seine et Marne.

La mort de Stéphane Mallarmé
Stéphane Mallarmé meurt prématurément d'une crise aiguë d'une affection du larynx. En apprenant sa mort Julie Manet notait dans son journal en date du 10 septembre 1898 :

« Oh ! quelle terrible chose : une dépêche nous apprend la mort de M. Mallarmé, est-ce possible, qu'a-t-il pu avoir, c'est affreux : Pauvre Mme Mallarmé : Pauvre Geneviève : Ah : que la mort de ce grand ami de papa et de maman, qu'ils avaient nommé mon tuteur, me rend malheureuse : Il était charmant pour nous , il nous appelait "les enfants" d'une façon si paternelle. Il me rappelait ces soirées du jeudi, si délicieuses, à la maison. Que c'est atroce de penser que cet homme que nous avons encore vu si bien portant en juillet est maintenant disparu. C'est terrible la mort. M. Renoir est bien émotionné en apprenant cette horrible nouvelle. Il part avec nous ce soir pour Valvins. Nous allons coucher à Troyes. »

La journée du dimanche 11 septembre est des plus sombres, Julie Manet confie encore à son journal :

« Nous arrivons à Valvins vers 2 heures. Que c'est pénible de descendre de ce chemin au bord de la Seine vers ce petit coin, on ne peut pas ne pas penser que celui qu'on pleure n'y est plus. Le bateau paraît solitaire, son bateau qu'il aimait tant et qui me rappelle une première promenade faite dedans en 1887 avec maman et papa qui demande à M. Mallarmé s'il n'avait jamais rien écrit sur son bateau. Non, répondit-il en jetant un regard sur sa voile, je laisse cette grande page blanche ».

Je me sens le cœur bien gros en entrant dans ce petit jardin, en montant l'escalier et en voyant ces deux malheureuses femmes, qu'elles sont à plaindre, comment les soulager, on ne peut que pleurer avec elles. Ah ! cette pauvre Geneviève quelle vie elle a !

Mme Mallarme et sa fille
Mme Mallarmé et sa fille Geneviève en deuil
C'est horrible de voir ce charmant intérieur sans M. Mallarmé, et au lieu de l'entendre causer dans ce jardin sous le marronnier que Geneviève planta étant petit, d'y voir son cercueil ; c'est atroce : Ah ! penser que nous n'entendrons plus jamais cette voix douce : Il avait une façon si affectueuse de dire "maman" lorsqu'il me parlait d'elle. C'est lui que papa avait nommé mon tuteur, c'est lui et M. Renoir les deux grands amis de papa et de maman. Ils étaient charmants à voir ensemble. Certes, je ne me doutais pas cet hiver que nous jouissions de leurs conversations réunies pour la dernière fois.

Hommes de lettres et paysans avec lesquels Mallarmé était si gentil, se trouvent réunis en grand nombre dans le jardin pour suivre cet enterrement si particulièrement navrant et on sent la douleur peinte sur tous les visages.

La cérémonie à l'église de Samoreau est très simple et très bien. Le cimetière qui longe la Seine et regarde cette forêt que M. Mallarmé aimait tant, où il est déposé près de son fils qu'il a perdu tout jeune ; Roujon prononce en tremblant quelques paroles au nom des vieux ; Catulle Mendès, Dierx, Mars, etc., pleines de simplicité sur le caractère de son ami, en faisant ressentir toute la douceur ; il arrache des larmes à tous en disant comment, lorsque dans les moments difficiles de la vie on avait recours à lui, vous promettant son aide, "il vous tendait sa main amie en abaissant ses paupières sur ses grands yeux d'enfants ». Quel portrait juste et discret, comme M. Mallarmé aurait voulu qu'il soit.

Paul Valéry prend ensuite la parole au nom des jeunes ; mais il est tellement émotionné qu'il ne peut continuer et l'on sort du petit cimetière en sanglotant avec Geneviève. C'est peut être encore ce qu'il y a de plus horrible le jour où tous les amis viennent vous embrasser et pleurer avec vous; mais ce qui est terrible, c'est de voir la vie reprendre son cours comme si personne n'avait disparu et peu à peu l'éloignement de l'époque où il vivait avec ceux qu'on pleure. Que c'est lugubre ce soir, lorsque tout le monde est parti, de ne plus trouver ici que deux femmes seules qui désormais seront sans celui pour lequel elles étaient tout.

Nous dînons avec elles et je nous revois à cette table, le 24 juillet, avec celui que nous nous attendons à chaque instant à apercevoir entrant par une porte disant une jolie phrase. Tout est lui ici. Valvins a perdu son âme".

La mort de Stéphane Mallarmé affecta beaucoup tout son entourage et particulièrement Misia Natanson et la plongea dans une profonde tristesse ; elle suivit le corbillard au bras de Paul Valéry alors que Thadée soutenait Renoir en pleurs. Dans "Peints à leur tour" Thadée Natanson raconte l'enterrement du Prince des Symbolistes :

« Renoir…, il fut de ceux que la mort subite et précoce de Mallarmé devait affliger le plus profondément du petit nombre de ceux qui, par un dimanche resplendissant du début septembre 1898, conduisirent ses restes de la maison de Valvins au Cimetière de Samoreau.

Renoir et Mallarme
Mallarmé et Renoir
De Valvins, vers la fin de l'après-midi, Renoir se laissa faire emmener par quelques autres d'une petite bande de fidèles du défunt jusqu'à la maison de campagne, où, à quelques lieues de là, ce petit monde villégiaturait chez moi.

Ils n'y arrivèrent que tard, et, au repas improvisé et qu'on avait dû leur faire attendre quelque peu, tous firent, après une longue journée en plein air, honneur largement ».

Après l'enterrement de Mallarmé, Thadée et Misia Natanson invitèrent quelques uns de leurs amis à Villeneuve-sur-Yonne dans leur maison qu'ils avaient acquis en 1896.

Natanson Villeneuve
Photo du déjeuner dans la cour du Relais à Villeneuve-sur-Yonne,
réunissant : Cipa Godebski, Marthe Mellot, Thadée Natanson, une domestique,
Édouard Vuillard (à demi caché), Misia Natanson, Romain Coolus, Ida Godebska,
Alfred Athis Natanson (premier plan) au retour de l'enterrement de Mallarmé.
Annette Vaillant, fille d'Athis (Alfred) Natanson, écrivit alors :

« Partout, toujours Misia, la femme d'oncle Thadée, câline elle enlace son mari - son père - le vieux sculpteur Godebski qui fut l'ami de Liszt. ..... A la fin d'une journée d'été tout le monde s'assied au jardin autour de Renoir déjà vieilli, on vient d'enterrer Mallarmé ».

Mecislas Golberg, le "Passant de la Pensée" alors en exil à Bruxelles rendit hommage à Stéphane Mallarmé dans deux publications : "Tablettes mensuelles" octobre 1898 et dans « Le Crépuscule de l'Art ». Malheureusement, il est impossible de savoir s'il y a eu une correspondance entre M. Golberg et S. Mallarmé comme il y en a eu une entre lui et Emile Zola. L'anarchiste du "Trimard", prophète en haillons du Sionisme naissant, mourut en décembre 1907 à Fontainebleau, rue St Merry, après avoir passé quelques mois au Sanatorium d'Avon.

Mallarmé et les femmes
Hérodiade,
Nommez-nous, pour qu'Amour ailé d'un éventail
M'y peigne, flûte aux doigts endormant ce bercail
Princesse, nommez-nous, berger de vos sourires.
Marie Gerhard
Marie Gerhard-Mallarmé (1835-1910)
Stéphane Mallarmé épousa Marie Gerhard, d'origine allemande, le 10 août 1863 en Angleterre et eut deux enfants: Anatole, né en 1865 et Geneviève, née en 1869.

L'acte de mariage de ce jeune couple stipule bien : « 10 août 1863 à l'oratoire de Kinsington, Middlesexe, Étienne (dit Stéphane) Mallarmé, âgé de 21 ans, artiste, épouse Christine Marie Gerhard, 25 ans ».

Mais comme tous les artistes, il aime les femmes et s'en entoura jusqu'à la fin de sa vie notamment de la présence de Méry Laurent.

Toujours est-il que Stéphane et son épouse Marie s'installent en 1874 pour les vacances dans le modeste logement qu'il a loué à l'étage de l'ancienne auberge de Cayenne, jadis fréquenté par des bateliers et des routiers.

« Jamais châtelain n'aima son manoir comme Mallarmé aima son logis de bois » a dit Méry Laurent qui a dû quelques fois le rejoindre à Valvins. Il y séjourna pensant ses vacances et ses loisirs durant plus de vingt ans fuyant ainsi ses obligations parisiennes. Il n'abandonna Paris avec l'idée de se fixer définitivement à Valvins qu'en 1897.

Mallarmé s'y était composé une douce image de "village natal" mais la mort le surprit subitement en septembre 1898 et il fut enterré dans le cimetière de Samoreau près de son fils Anatole.

Méry Laurent

Mery Laurent
Méry Laurent
Méry Laurent, qui avait été figurante au Châtelet, recevait dans son salon les poètes et les artistes, et fut le modèle et la maîtresse de Manet, avant d'être celle de Mallarmé qui fut séduit par son goût de l'art japonais pour la décoration de salon.

Aristide Marie dans sa "Forêt Symbolique" dit : "Dans l'atelier de Manet, il rencontra une blonde muse aux triomphantes carnations ; c'est Méry Laurent, modèle favori de l'artiste, qui a laissé d'elle d'opulentes effigies ».

Georges Moore qui était également sous le charme précise:

"Grande et belle femme, semblable à une rose-thé, la fille d'un paysan et la maîtresse de tous les grands hommes de ce temps ». Cette blonde Méry ne tarda pas à surprendre l'émoi suscité par son effluve voluptueux sur Mallarmé.

Dans la préface du livre de Stéphane Mallarmé : Documents iconographiques, Henri Mondor, peint le portrait de Méry Laurent ainsi :

« Dans le même temps, Mallarmé faisait la connaissance, grâce à E. Manet, d'une jeune femme d'humeur gaie et qui savait, autour de ses charmes amples et drus, porter de ravissantes toilettes.

Son sourire d'étonnement heureux, ses yeux d'un bleu saphir, sa fraîcheur rose thé ou d'églantine, le dessin de ses contours avait séduit le peintre et quelques autres.

Elle acceptait, d'un dentiste étranger, une opulence dorée qu'elle eut volontiers partagée avec poètes et artistes. Elle avait l'intelligence et la simplicité charmante d'aimer l'esprit d'autrui. Mallarmé dut à Méry Laurent, pendant près de vingt ans, quelques rêves nouveaux… »

Mery Laurent
Mallarmé et Méry Laurent
Dans ses Documents iconographiques, Mallarmé a placé souvent le portrait de Méry Laurent à différentes époques de leur vie.
Misia Godebska
Marie Sophie Olga Zénaïde Godebska, plus communément appelée Misia, naît le 30 mars 1872 à St Petersbourg alors que sa mère meurt en lui donnant le jour. Celle-ci Sophie Godebska était la fille aînée d'Adrien-François Servais et de Sophie Féguine.

Virtuose du violoncelle, Servais atteignit rapidement la gloire et la renommée, il épousa à St Petersbourg Sophie Féguine, fille d'une famille juive prospère, qui aimait la musique et qui s'était convertie au christianisme. Ce couple se fit construire à Halle, en Belgique, une maison de style italien et accueillait tout le monde musical de l'Europe.

Misia par Bonnard
Misia au piano par Bonnard
Misia fut donc élevée par sa grand-mère maternelle dans cette maison de Halle où Franz Liszt, un familier, avait la coutume de prendre la fillette sur ses genoux pour la laisser jouer un morceau de Beethoven. Reine de Paris à l'âme polonaise, à l'âge de 21 ans, après une fugue à Londres, Misia Godebska épousa en 1893 son ami d'enfance Thadée Natanson.

Elle fut considérée comme la plus jolie femme de Paris.

Élève de Gabriel Fauré au piano, Misia régna alors, mutine, rouée et fantasque, au siège de la Revue Blanche, rue Lafitte, comme dans la demeure de Thadée, rue St Florentin. De son charme slave, elle fascina les plus grands, de Mallarmé qui écrivait des vers sur son éventail, à tous ces peintres qui l'immortalisèrent sur leurs toiles ; Toulouse-Lautrec, Bonnard, Vuillard et Renoir. Misia fée dangereuse, savait tout faire et tout défaire. Jolie, d'une beauté un peu canaille malgré son profil de Minerve, elle n'était pas encore la matrone superbe au menton empâté, telle que Lautrec la devina. Cette femme-enfant, cette femme-chatte, s'intéressait à tout, lisait les manuscrits envoyés à la "Revue", courait les expositions, les théâtres et passait des heures au piano.

Les Natanson voyageaient et sortaient beaucoup. En 1896, ils assistèrent à la "Première orageuse" d'Ubu Roi de leur ami : Alfred Jarry dont la musique était de Claude Terrasse. Lors de cette première d'Ubu Roi, montée par leurs amis Jarry, Toulouse-Lautrec, Bonnard et Vuillard, Misia prit part à l'une des plus grandes batailles du théâtre auxquelles elle sera intimement associée ; elle participera également à celle du "Prélude de l'après- midi d'un faune" et celle du "Sacre du Printemps". En 1902 Misia quitta Thadée pour épouser Alfred Edwards, directeur du Journal "Le Matin". En troisième noces, elle épousa le peintre espagnol José Maria Sert.

Misia Sert s'éteignit le 15 octobre 1950, Coco Chanel s'enferma avec la défunte et l'habilla en rendant son amie aussi belle que du temps de sa jeunesse. C'est vêtue de blanc, ceinte d'une écharpe rose et reposant parmi des fleurs blanches que Misia fut ensevelie également dans le cimetière de Samoreau non loin de la tombe de Mallarmé ; ainsi le Prince des Symbolistes et la Reine de Paris étaient réunis pour l'éternité.

Berthe Morisot et Julie Manet

Marie Gerhard
Berthe Morisot et Julie Manet par Renoir
Berthe Morisot, veuve d'Eugène Manet, tenait des réceptions à Paris au temps où son mari était vivant pour lui apporter distractions et divertissements. Lors de ces réceptions se joignaient aux invités, le poète symboliste Mallarmé, Monet, Degas, Caillebotte, Renoir, Puvis de Chavannes et même Whistler de temps en temps.

Il y eut une soirée particulièrement mémorable en 1890, quand Mallarmé donna sa fameuse conférence sur Villiers de l'Isle-Adam, devant un auditoire choisi d'une trentaine de personnes, dont Henri de Régnier, Paul Dujardin, de Wyzewa, Mme Mallarmé, sa fille Geneviève, et naturellement Julie et ses cousines ; Paule et Jeannie Gobillard.

Mallarmé partageait réellement l'amour de la musique avec Berthe Morisot, elle allait au concert avec Julie, le dimanche après-midi, aux concerts Lamoureux ou aux concerts Colonne.

Elles retrouvaient Mallarmé dans les galeries où il prenait des notes dans un carnet qu'il portait toujours sur lui et ensuite ils se promenaient sur les Champs-Elysées en commentant la séance de l'après-midi.

Le professeur Jules Boucherit, qui a reçu la Médaille des Justes par l'Etat d'Israël en 1995, donna des cours particuliers de violon à Julie. Les liens entre le peintre Berthe Morisot et Stéphane Mallarmé étaient très forts puisqu'en avril 1892 Berthe, consciente de la fragilité de sa santé, désigna Stéphane Mallarmé comme tuteur de sa fille Julie et forma un conseil de famille pour la recueillir au cas où il lui arriverait malheur. Stéphane Mallarmé ayant beaucoup d'affection pour Julie, lui avait offert un cooley nommé Laërte. Berthe et Julie vinrent passer des vacances en 1893 près de Mallarmé à Valvins.

Dans son journal en date du 24 août, Julie Manet notait :

« Arrivées à Fontainebleau à quatre heures et demie, nous avons déposé nos affaire à l'hôtel de Valvins, car l'hôtel de Valvins-les-bains, comme on l'appelle, est au bord de la Seine. M. Mallarmé nous a menées au commencement de la forêt où se trouvaient Mme et Mlle Mallarmé ; nous sommes restés là jusqu'à l'heure du dîner. Dîné dehors devant l'auberge sous des arbres au bord de la Seine. Couché dans une petite chambre avec vue sur la Seine ».

A Valvins, Berthe Morisot et sa fille passèrent la plupart du temps à peindre, à faire des promenades à pied ou en voiture avec Stéphane Mallarmé, Marie, son épouse et Geneviève, leur fille. Berthe fit également du bateau avec Mallarmé alors que Julie s'adonna à sa nouvelle passion : la photographie en immortalisant Thadée Natanson et Mallarmé sur le" S.M. "

Poème de Mallarmé :
Le Cygne

illustré par Berthe Morisot
Le Vierge, le vivace et le bel aujourd'hui
Va-t-il nous déchirer avec un coup d'aile ivre
Ce lac dur oublié que hante sous le givre
Le transparent glacial des vols qui n'ont pas fui :
Un cygne d'autrefois se souvient que c'est lui
Magnifique mais qui sans espoir se délivre
Pour n'avoir pas chanté la région où vivre
Quand du stérile hiver a resplendi l'ennui.

Après la mort de Berthe Morisot en 1895, Stéphane Mallarmé fut nommé tuteur de Julie Manet ainsi que de ses deux cousines : Paule et Jeannie Gobillard. Le Conseil de famille et Mallarmé décidèrent que les trois jeunes filles vivraient ensemble, avec une gouvernante compétente, trouvée par Mallarmé, et qui serait chargée de surveiller la maisonnée. Julie suivit les pas de sa mère et se lança dans la peinture et laissa les tableau :
Yole
Mallarmé en bateau sur la Seine à Valvins
En 1896 Stéphane Mallarmé s'occupa de la rétrospective de l'œuvre de Berthe Morisot chez Durand-Ruel et demanda à Julie son aide pour numéroter les tableaux.

Aucun signe ne prévoyait la disparition fulgurante de Mallarmé en 1898. Le 24 juillet, Julie écrivait dans son cher Journal :

« Nous passons la journée à Valvins avec les Mallarmé qui nous reçoivent avec leur gentillesse habituelle et nous éprouvons un vif plaisir à les voir. Mallarmé nous promène en barque sur la Seine qui est délicieuse, nous rentrons pour prendre le thé dans le jardinet tout fleuri de roses trémières : trois d'un joli rose nous représentent, dit Mallarmé.

Nous dînons avec une Danoise, amie de Geneviève qui est très drôle, elle est étonnée que nous ne fumions pas. Elle raconte qu'en arrivant à Paris, se promenant un jour aux Buttes-Chaumont avec une amie, elle entre dans un restaurant pour se rafraîchir et voyant "absinthe" écrit sur la carte, elle en demande, ne sachant ce que c'était. "Ce n'est pas pour les petites miss", répond le garçon qui lui apporte de l'eau et de la grenadine.

Après le Dîner on commence à se faire des adieux et à s'embrasser ; la Danoise déclare que par principe elle n'embrasse jamais un homme. M. Mallarmé nous accompagne jusqu'à la petite gare de Valvins avec Geneviève et nous embrasse de nouveau, on se quitte en se souhaitant bon été, à regret  ».

Mais le 10 septembre Mallarmé devait disparaître et ne pourra être présent en mai 1900, en la paroisse St Honoré d'Eylau, dans le quartier de Passy, au mariage de Julie et d'Ernest Rouart, ainsi que de celui de Jeannie Gobillard et de Paul Valéry.

Stéphane Mallarmé et le Symbolisme
Né à Sens dans une famille de fonctionnaires de l'enregistrement, Mallarmé est dès sa jeunesse marqué par une insondable tristesse. Après son bac, bien que Surnuméraire de l'Enregistrement, il se liera avec Emmanuel des Essarts, un jeune poète fréquentant les milieux littéraires de la Capitale, qui lui fera connaître la "Revue Fantaisiste" que venait de fonder Catulle Mendès.

En parallèle de sa carrière poétique, Stéphane Mallarmé (1842-1898) fut professeur d'anglais. Reçu au certificat d'aptitude à l'enseignement de l'anglais en 1863-64, il débuta sa carrière de Professeur à Tournon puis il passa par Besançon et Avignon et en 1871, il est nommé au Lycée Fontanes.

André Fontaines dans "Mes souvenirs du Symbolisme" précise : « Mallarmé fut nommé professeur d'anglais au Lycée Fontanes le 25 octobre 1871, promu officier de l'Académie le 14 juillet 1883 et muté au Lycée Jeanson de Sailly en octobre 1884. Il enseignait dans les petites classes et n'était guère apprécié de ses supérieurs. Son proviseur le notait en ces termes:

« En dépit des observations de l'inspection générale, ne fait aucun effort pour s'améliorer en anglais. Je doute même qu'il sache le français ! », Est-ce pour cette raison qu'il termina sa carrière au Collège Rollin ? Un de ses élèves du Lycée Fontanes (Condorcet), Jean Ajalbert dans "Mémoires en vrac" le décrit ainsi :

Mallarmé, naguère notre professeur d'anglais.... On ne le chahutait pas, mais tout juste. C'était une "Classe blanche", avec ce petit homme, le plus effacé des maîtres, dont nous aurions oublié le nom, si, par la suite.... il écrivait au tableau quelques vers à traduire et apprendre, puis s'installait à sa chaire, derrière un barrage de livres et de papiers, où il travaillait pour lui... »

Mallarme jeune
Stéphane Mallarmé par François Nardi
Le Lycée Fontanes était "le seul lycée pour la Plaine Monceau, le Bois, Passy... A côté de l'escouade de poètes symbolistes qui a rendu cette génération célèbre, des anciens élèves du Lycée Fontanes, à qui Camille Bloch et Gabriel Astruc servirent de répétiteur, laissèrent leur nom à la postérité: "le poète Ephraïm Mikhaël, le peintre Paul Sérurier, le futur duc Elie Decaze, Paul de Remusat, Stuart Merryll, André Fontainas, Pierre Quillard, Thadée et Alfred Natanson, Marcel Proust, Jacques Bizet, fils de Georges et Geneviève Halévy, etc.... Dès 1872 les amis à Paris de Mallarmé sont Villiers l'Isle-Adam, le Comte de Lisle, Banville, Mendès, Verlaine, Anatole France, Rimbaud, Moréas, Manet, Whistler, Augusta Holmès, etc...

Il s'installa en 1874 avec sa famille rue de Rome où dans son appartement au 4ème étage il recevait chaque mardi, à partir de 1880, un groupe croissant d'amis et de disciples. Mallarmé collabora pour neuf numéros de la "Derrière Mode" mais de style Parnassien, fut surtout le plus reconnu des poètes symbolistes avant de passer progressivement vers "l'Hermétisme".

Ses œuvres sont alors : "Les fenêtres", "L'Azur", "Brise Marine", "Hérodiade", "Le Pitre châtié", "Toast funèbre", "le Tombeau d'Edgar Poé", "l'Hyperbole" et "le Tombeau" laissé inachevé, qu'il avait voulu composer après la mort de son fils Anatole. Il écrivit en 1876 "L'après-midi d'un faune".

La Bibliothèque Nationale conserve encore une des plaquettes éditées à cet effet par Edouard Manet et Stéphane Mallarmé sous le générique : "L'après-midi d'un faune" églogue par Mallarmé avec frontispice, fleurons et ciel de lampe. Manet et Mallarmé confectionnèrent ce que le poète décrivit plus tard comme « une des premières plaquettes coûteuse et sac à bonbons mais de rêve et un peu orientaux ».

Le Tombeau d'Edgar Poe

Tel qu'en lui même enfin l'éternité le change,
Le poète suscite avec un glaive nu
Son siècle épouvanté de n'avoir pas connu
Que la mort triomphait dans cette voix étrange…

Stéphane Mallarmé restera pourtant à l'écart de toute école et poussa bien au-delà du symbole proprement dit sur la voie de l'hermétisme mais sa haute conception de l'idéal, son dévouement total au sacerdoce poétique et ses dons exceptionnels font de lui le plus grand et le plus pur des symbolistes.
Mallarme jeuned
Stéphane Mallarmé par Manet
Or qu'est-ce que le Symbolisme ? C'est l'ensemble des jeunes gens de 1885 aux premières années du XXème siècle qui ont résolu de se défendre contre l'emprise d'une école, qui ont lutté contre l'école dont Emile Zola fut le chef incontesté.

Ils reprochaient également aux Parnassiens de n'attacher leur attention qu'à des formules trop strictes.

La jeune école symboliste, dont Jean Moréas écrivit "Le Manifeste du Symbolisme", va considérer Mallarmé comme son maître, et les Mardis de la Rue de Rome réuniront autour de lui un grand nombre de disciples charmés par ses propos sur la poésie et la musique: René Ghil, Gustave Kahn, Jules Laforgue, Vielé-Griffin, Henri de Régnier, Maurice Barrès, Paul Claudel, André Gide, Paul Valéry et l'éditeur Raymond Schwab.

Le Comte Robert de Montesquiou écrivit de nombreux poèmes symbolistes, il fut l'ami généreux de Mallarmé, Verlaine, Fauré et mit à la mode un certain esthétisme.

Gustave Kahn a précisé : « C'était Mallarmé qui avait surtout parlé du Symbole, y voyant un équivalent au mot Synthèse et concevant que le symbole était une synthèse vivante et ornée, sans commentaires critiques ».

A propos du "Symbolisme" Stéphane Mallarmé se justifiait ainsi : « J'ai jeté les fondements d'une œuvre magnifique. Tout homme a un secret à lui. Beaucoup meurent sans l'avoir trouvé, ou ne le trouveront pas, parce que, morts, il n'existera plus, ni eux. Je suis mort et ressuscité avec la clef de pierreries de ma dernière cassette spirituelle. Il me faut vingt ans, pour lesquels je vais me cloîtrer en moi, renonçant à tout autre publicité que la lecture de mes amis ». Léo d'Orfer a surenchéri : « La poésie est l'expression, par le langage humain ramené à son rythme essentiel, du sens mystérieux des aspects de l'existence: elle doute ainsi d'authenticité notre séjour et constitue la seule tâche spirituelle ».

Stéphane Mallarmé découvrit les œuvres de Wagner grâce à Edouard Dujardin, mais la musique irait-elle plus loin que la poésie. Il en conçut une "sublime jalousie" et se persuadera que la poésie devait "reprendre à la musique son bien".

Mallarmé se tournera également vers la peinture symbolique: un banquet présidé par Mallarmé fut donné en l'honneur de Gauguin le 23 Mars 1891 au Café Voltaire. Avant son départ pour Tahiti Paul Gauguin put lire dans le "Mercure de France" un long article d'Albert Aurier intitulé: "Le Symbolisme en Peinture : Paul Gauguin".

Mallarmé et la Revue Blanche
En saison, Thadée Natanson et sa femme ouvraient aux collaborateurs de la Revue Blanche et à leurs amis "La Grangette", leur maison de Valvins, qu'ils avaient achetée en 1894, spécialement pour être à coté de Mallarmé.
Revue blanche
Olivier Barrot et Pascal Ory dans leur livre La Revue Blanche disent à propos de Mallarmé :

"Cet homme du XIXème siècle réunissait chez lui ce que le XXème comportera de plus éminent, Gide, Valéry, Claudel. Où était Proust ? Si Mallarmé n'a pas exercé sur la seule Revue Blanche sa vertigineuse influence tutélaire, la publication des Natanson, voisin du Maître de Valvins, s'est inclinée devant lui, lui offrant une chronique au long de l'année 1895, "Variation sur un sujet".

Il y donna aussi quelques poèmes et chroniques, et y retrouva le temps d'un article ses amis wagnériens et symbolistes Régnier, Gourmont, Vielé-Griffin, Verhaeren.

Le texte de la conférence donnée par Mallarmé à Oxford et Cambridge, parut en avril 1894 dans la Revue Blanche.

Les Mardis de la Rue de Rome deviendront le "Rendez-vous" des poètes symbolistes". Rémy de Gourmont se souvient: « On écoutait sa parole comme un oracle. Vraiment, c'était bien une sorte de Dieu".

A "La Grangette" de Valvins, Thadée et Misia Natanson recevaient entre autres Zola, Maeterlinck, Anet, Willy et Colette, Monet, Manet, Corot, Sisley, Pissaro, Puvis de Chavannes.

Cette Maison, au temps des Natanson, voyait aussi quelques fois l'apparition d'Octave Mirbeau qui n'habitait pas loin de Fontainebleau.

Misia, muse hospitalière, y posait pour d'innombrables portraits et photos et jouait du piano pour ses invités magnétisés par cette musicienne autant que par sa musique.

Bonnard et Vallotton ont laissé une série de magnifiques portraits de Misia avec ses cheveux en brioche et son corps épanoui.

De nombreuses photos montrent Thadée Natanson à Valvins en compagnie de Mallarmé faisant ensemble de longues promenades en bateau sur le voilier qui portait fièrement le nom de "S.M." (Stéphane Mallarmé). Thadée disait de Mallarmé: « Une bonne part des joies qui ravissaient, à Valvins, Mallarmé, les tirait de son bateau le «  S.M ».

En arrivant, il le vernissait de la quille au fond de la coque, seul, le gréait. Il ne laissait non plus à personne le soin de faire étinceler jusqu'au dernier crochet de métal. Ce n'est que lorsque le S.M. lui paraissait irréprochable que, la barre en main, il se livrait à la voile, et, par elle, prenait possession de la Seine". Stéphane Mallarmé appelait également son voilier : "La Yole à Jamais Littéraire".

Outre son travail à la Revue Blanche et les "Mardis Littéraires" au 87 rue de Rome, Stéphane Mallarmé se rendait souvent chez Alexandre Natanson, qui avait un hôtel, Avenue du Bois, et où il donnait de somptueuses réceptions.

Lors de la pendaison de la crémaillère de sa nouvelle résidence, décorée par Vuillard, il convia trois cents personnes et demanda à Toulouse-Lautrec de servir de maître de cérémonie et de barman. Ces soirs là, le Tout-Paris, se pressait sous les floralies en fer forgé et donnait ainsi rendez vous Catulle Mendès, le couple Aron et Hessel, Reynaldo Hahn, Sacha Guitry, Henry Bataille, Porto Riche, Edmond Rostand, Forain, etc.

Natanson et la Revue Blanche
La famille Natanson est une lignée de riches banquiers juifs polonais qui émigrèrent en France dans la seconde moitié du XIXème siècle.

Adam Natanson, après avoir amassé une fortune considérable en Pologne, vient s'établir à Paris, en 1880 Place St Michel, ensuite il s'installera Avenue de Friedland puis acheta un hôtel particulier au 85 rue Jouffroy.

Adam et Annette Natanson eurent quatre fils: Alexandre, Thadée, Léon et Louis Alfred. Léon ayant disparu, les trois autres frères, puisant dans l'immense fortune familiale, fondèrent "La Revue Blanche" avec quelques uns de leurs condisciples du Lycée Fontanes (Condorcet): Marcel Proust, Romain Coolus, Léon Blum, Lugné-Poé, Robert Dresbois, Pierre Veber, Fernand Gregh etc...

C'est à Spa, en Belgique, qu'Auguste Jeunhomme et Joé Hogge eurent l'idée d'une Revue consacrée uniquement à la poésie. Joé Hogge était un ami de Louis-Alfred, le cadet des Natanson.

Natanson misia
Thadée Natanson et Misia par Vuillard
L'idée de fonder une Revue le passionna et il en parla à ses frères, Thadée et Alexandre. Le premier numéro parut le 1er décembre 1889 et s'annonçait bimensuel.

Les administrateurs principaux étaient Auguste Jeunhomme et J.H. de Andelles mais le nom de Thadée Natanson se multiplia sur les couvertures de la revue. Puis un comité fut formé avec Thadée et Louis-Alfred alors qu'Alexandre en prenait la direction.

Alexandre Natanson, l'aîné, portait le titre de directeur-gérant, Thadée tenait la critique d'art et Alfred qui, sous le nom d'Athis, signait des portraits satyriques. Cette revue étonna pas son éclectisme et son nom conformisme; par magie, un vent de liberté souffla sur la « Revue Blanche », ce qui fit dire à André Gide que c'était: « un centre de ralliement de toutes les divergences".

Elle permit de voir collaborer Maurice Barrès le traditionaliste et l'anarchiste Félix Fénéon, Marcel Proust et le virulent Mirbeau.

La Revue Blanche fut également le centre de ralliement des "Nabis". Misia Godebska, qui venait d'épouser Thadée Natanson, fut très vite l'égérie de la "Revue" où écrivirent Mallarmé, Léon Blum, Tristan Bernard, Claudel, Gide, Péguy, Apollinaire, Jarry, Jules Renard, Barrès, Proust, Fagus, Francis Jammes, etc....

La Revue Blanche offrit ainsi ses colonnes aux meilleurs talents de l'époque; les dessinateurs ou les peintres de Bonnard à Vuillard, de Toulouse-Lautrec à Vallotton et des illustrateurs comme Maurice Denis et Odilon Redon. En 1894, Léon Blum et Tristan Bernard proposèrent aux Natanson de créer ensemble une chronique des Sports dans la "Revue"; Léon Blum signa la rubrique cycliste et Tristan Bernard celle des "potins hippiques".

C'est Romain Coolus, pseudonyme de René Weil, qui avait introduit Tristan Bernard dans cette équipe. Et la musique ? Ce n'est qu'en 1901 que la musique trouva sa place dans la revue sous la plume de Claude Debussy, ainsi pendant quatorze ans les sommaires de la Revue collectionnèrent les signatures les plus célèbres.

Thadee et Misia
Thadée et Misia

La Revue Blanche ne survivra guère au divorce du couple Misia-Thadée Natanson, la muse partie le charme était rompu.... Il faut dire que la Revue Blanche en 1900, qui avait englouti des sommes considérables, commençait à poser à Thadée un grave problème financier. Thadée avait d'ailleurs perdu son enthousiasme initial pour les lettres et s'était lancé depuis l'affaire Dreyfus dans la politique et les questions sociales.

Très affecté par ce divorce, bien que n'ayant rien fait pour l'empêcher, Thadée se vengea en écrivant avec Octave Mirbeau "Le Foyer", une pièce grinçante à trois personnages, inspirée de sa propre vie. Au bord de la ruine, les frères Natanson laissèrent tomber leur création, ayant en tête une foule de brillants projets dans le domaine de l'industrie.

Thadée Natanson céda alors ses parts à son ami Eugène Fasquelle en 1903 après avoir fait paraître aux "Editions Revue Blanche" les deux premiers romans à succès de Tristan Bernard: "Mémoires d'un jeune homme rangé" et "Un mari pacifique". Thadée Natanson était riche et beau, s'habillait avec une élégance recherchée et faisait partie de la jeunesse dorée de l'époque. Il avait un appétit d'ogre, commandait ses repas extraordinaires chez Larue.

Thadée envoyait Lala, une des chambrières de son père, cherchez sa parfumerie chez Houbigant; "L'Idéal" dont était imprégné ses incalculables mouchoirs de chez Charvet. Ce géant utopiste et léger était aimé de ses amis et était l'ami des femmes.

Thadée Natanson était un prodigue. Esthète, séduit par les combinaisons les plus subtiles - il avait le génie des affaires; un génie souvent malheureux. Ses emballements invincibles le faisaient entraîner ses frères, parfois même les femmes de chambre - presque toujours amoureuses de ses manières seigneuriales - dans des entreprises périlleuses.

Alfred Edwards, proposa à Thadée le poste de directeur d'une mine de charbon en Hongrie pour l'éloigner de Misia, proposition qu'il accepta sans hésitation.

Dans les premiers jours d'août 1914, le capitaine d'artillerie Thadée Natanson épousa en secondes noces: Reine Vaur. Il l'amena à Lyon, où pressenti par son ami Loucheur, il devait diriger avec autorité et efficience, une usine de guerre. En 1921, on apprenait la nomination de Thadée Natanson au grade de Chevalier de la Légion d'Honneur par le Ministère des Travaux Publics.

Après la fin de la première guerre mondiale Thadée Natanson fut saisi par le virus des affaires, il se lança dans plusieurs affaires infaillibles et ruina tout le clan Natanson.

Pourtant il resta toujours très près de ses amis les peintres, si vers 1895, on le voit en photo avec Pierre Bonnard chez Vuillard, d'autres photos le montrent avec Bonnard en barque sur la Seine en 1923 ou avec le même à La Roche-Guyon ou bien encore avec Ker Roussel, Jacques Roussel, Pierre Bonnard et Vuillard sur la route de Vernonet en 1924.

Mais combien d'épreuves devait-il encore subir ? Reine Natanson avait du caractère, pendant les années noires de l'occupation (1940-1944), elle marchait lentement et fièrement au bras de son mari, grand vieillard marqué d'une étoile jaune.

Thadée Natanson mécène, journaliste et chroniqueur, fut l'ami des plus grands artistes notamment des peintres tels le peintre américain Elie Naderman ou Picasso qu'il décrit dans son livre "Peints à leur tour".

En 1951, après avoir écrit un livre, préfacé par Annette Vaillant-Natanson*, sur Toulouse-Lautrec, il publia une excellente biographie de son ami, le peintre Pierre Bonnard, disparu en 1947, sous le titre : "Le Bonnard que je propose", Thadée Natanson, s'éteignait à son tour quelques mois plus tard. Jamais le souvenir de Valvins ne le quitta.

Valvins et l'Affaire Dreyfus

Jaccuse
Émile Zola : J'accuse
Dans une lettre à Edouard Dujardin, Stéphane Mallarmé s'émerveillait: « C'est une musique d'eau, de lumière et de verdure que Valvins. »

Pourtant les choses semblaient changer à Valvins. L'Affaire Dreyfus allait monter jusqu'aux membres d'une même famille les uns contre les autres, mais l'antisémitisme, avivé par cette situation ne fut pas plus virulent en Seine-et-Marne que dans un autre département.

Suite aux différents articles de Drumont dans la "Libre Parole" quelques officiers juifs de l'École d'Artillerie de Fontainebleau démissionnèrent, le Capitaine Coblenz se battit en duel avec un de ses condisciples à cause des "Laisser Courir" des Lebaudy et Ernest Crémieu-Foa cacha le cheval de son frère André à Samois à la suite de la mutation de celui-ci dans le corps expéditionnaire africain faisant suite à la mort en duel du Capitaine Armand Mayer.

Dès le début de l'Affaire Dreyfus, les Natanson et la plupart de leurs amis, dont Charles Péguy, se rangèrent auprès de Bernard Lazare et de Théodore Reinach puis ensuite d'Emile Zola pour défendre le capitaine déchu.

Affaire Dreyfus
Publication anti-dreyfusarde
Et si "La Revue" avait observé un silence de principe sur L'Affaire parce qu'elle entendait siéger "ailleurs" au lendemain de l'acquittement du vrai coupable; Estherhazy, par ses pairs et la publication du "J'accuse" de Zola, c'est la Revue Blanche, qui cette fois, collectivement prit la parole.

Valvins fut alors divisé en deux camps: les Dreyfusards partisans de la révision du procès Dreyfus; parmi eux, Monet, Proust, Jacques Emile Blanche, Thadée Natanson, Pissaro et naturellement Emile Zola.

Les antidreyfusards comprenaient Degas, Paul Valéry, Alexis Rouart, Henri Rouart et ses quatre fils, Forain et Cézanne.

Thadée Natanson, homme d'une grande culture, qui côtoya les plus grands artistes de son temps, fut l'un des familiers de Degas, pourtant l'Affaire Dreyfus allait les séparer à jamais. Il constata avec amertume l'attitude de ce peintre en notant : « Degas… lorsque l'ami fidèle de tous les Halévy et Mme Strauss-Bizet** et qui le fut longtemps de Pissaro, devint au cours de l'affaire, plus que jamais antisémite et nationaliste ce fut avec une violence qui pouvait le faire pleurer de rage. »

Auguste Renoir eut quelques mots sévères pour les juifs mais s'arrangea pour rester neutre. Jean Renoir, son fils, rapporta ses paroles:

« Les mêmes éternels camps, avec des noms suivant les siècles. Protestants contre catholiques, républicains contre monarchistes, communards contre versaillais. Maintenant, la vieille querelle se réveille. On est Dreyfusard ou antidreyfusard. Moi, je voudrais bien essayer d'être tout simplement français. »

Ce fut probablement l'attitude de Mallarmé, mais cela ne fut pas le cas de tout le monde : Julie Manet *** adressa en 1899 une souscription de six francs à "La Libre Parole" pour le rapatriement des Juifs à Jérusalem.

A côté de la Revue Blanche, Alexandre Natanson avait fondé en 1896, une petite revue hebdomadaire: "Le Cri de Paris". Cette revue fut un enfant terrible, indiscret, babillard, mais dont la malice n'a jamais été agressive que contre les ridicules et les abus. Lors d'un procès intenté contre elle, son avocat Paul Morel précisa dans sa plaidoirie: « ... parmi la plupart des grands bourgeois juifs et les Membres du Consistoire Israélite étant assimilés ou se définissant comme français de confession israélite, l'affaire Dreyfus n'attira nullement des familles comme les Natanson vers le sionisme naissant. »

A travers le temps et l'espace, il est possible d'imaginer à Valvins les discussions qui devaient sans doute courir sur Alfred Dreyfus, sur son avocat Me Fernand Labori qui habita à Samois puis aux Basses-Loges à Avon ou sur Crémieu-Foa ou bien encore sur les affaires d'antisémitisme dans l'armée à Fontainebleau, mais c'est surtout la vie des artistes qui devait intéresser tout un chacun.

La vie artistique à Valvins et Avon
La Commune d'Avon et son extension de Valvins formaient alors avec le Val-Changis une vraie "Cité des Arts". Si Édouard Dujardin, fondateur de la "Revue Wagnérienne", recevait des écrivains comme Gabriele d'Annunzio, des poètes comme Catulle Mendès et des caricaturistes comme André Rouveyre, les Durand recevaient à Bel-Ébat les musiciens.

Mecislas Golberg séjourna quelque temps au Sanatorium du "Vert Logis". Les ateliers du très pompier sculpteur Cyprian Godebski, associé à Jacquemin, se trouvaient au 3 rue des Pleus à Fontainebleau et, à partir de 1876, il ouvrit un atelier à la "Cave Coinard" à Avon.

En effet, après avoir transféré la fabrique de porcelaine (ayant appartenu à Jacob-Petit aux Basses-Loges) aux Pleus, Etienne Jacquemin la domicilia ensuite rue de la Cave Coinard à Avon près des fours à Chaux (à plâtre). Il sera suivi par C. Godebski, Jules Febvre et Jérome Pointu alors qu'Eugène Schopin avait créé une faïencerie à Montigny-sur-Loing.

Cyprian
Cyprian Godebski (1835-1909)

Cyprian Godebski III est né en 1835 à Méry-sur-Cher et meurt en novembre 1909 à Paris. Sculpteur de l'École Française du XIXe siècle il eut pour maître Jouffroy, ami du sculpteur-photographe Samuel Adam-Salomon. Il exposa au Salon de Paris à partir de 1857.

Ami de Franz Liszt, d'Alphonse Daudet, des Frères Goncourt, de Mallarmé, Godebski fit le buste de plusieurs hommes célèbres notamment des Polonais Adam Mickiewicz. Il eut une mention honorable en 1880, 1884 et 1886. Outre différentes sculptures qui se trouvent au Casino de Monte-Carlo, Godebski réalisa un médaillon en bronze d'Hector Berlioz pour la tombe du compositeur au Cimetière de Montmartre.

Connue à l'étranger, il réalisa pour le Musée national de Pologne de Rapperswill: le buste de Mickiewicz et une statue de San Martin pour Lima, à Budapest; le buste de Von Zichy, à Compiègne les bustes de C.A.C. Gonêl et de H.Z. Rendu, à Gand: Buste du Dr Bruggraeve, à Lille; le groupe de bronze représentant la persuasion, à Moscou pour les Roumiantzeff: bustes de Bach et de Beethoven.

Quelques unes de ses oeuvres sont réparties également en France; à Paris pour le Musée du Louvre: le buste de l'archéologue J.H. Barbet de Jouy, à Poitiers et à Toulon: la force brutale étouffant le génie. La statue de Notre-Dame des naufragés, à la Pointe du Raz.

Notre-Dame
Cyprian Godebski : Notre-Dame des Naufragés
Cyprian III Godebski, descendant d'une vieille famille de l'aristocratie polonaise, avait un hôtel au Parc Monceau. Il se maria en secondes noces avec Mathylda Rosen-Natanson, belle sœur d'Adam Natanson. Le frère d'Adam, banquier lui aussi, lui avait laissé une confortable fortune. Les Godebski menèrent grand train, ils reçurent dans leur hôtel particulier des figures célèbres du monde parisien comme les Daudet, les Goncourt et tout le gratin de l'émigration polonaise.

Au temps où il avait ses ateliers à Avon, Cyprian Godebski acquit La Grangette, à Valvins.

Père de Misia et de Cipa, on voyait souvent Cyprian "Aux Relais" la maison des Natanson à Villeneuve-sur-Yonne. Les anniversaires Mallarméens, célébrés chaque année à Valvins et à Samoreau, et qui, après le banquet au "Pont de Valvins", réunissaient, au "Val Changis", les amis de Dujardin, furent jusqu'à la dernière guerre organisés par le symboliste Edouard Dujardin.

Aristide Marie : Dujardin

Wagnériste, Edouard Dujardin laissa dans la Revue Blanche un article intitulé: « De la Périchole et de l'absolu dans la Musique » alors qu'Alfred Natanson dans ces pages donnait vie à Eléonora Duse, impossible amour de d'Annunzio.

"La Grangette" était située sur la rive droite de la Seine, un peu plus loin que la maison de Mallarmé. Elle fut la propriété de Cipa et d'Ida Godebski après 1896 puis celle de leur fille Marie (Mimi) Godebska Blacque-Belaire. Cipa, critique musical et grand ami de Maurice Ravel, était le demi frère de Misia et le cousin de Thadée Natanson par le mariage de Cyprian Godebski avec Mathylda Rosen-Natanson. Ravel, habitué de Valvins, y composa Les contes de la Mère l'Oye pour leurs enfants.

Grangette
La Grangette par Vuillard
Arthur et Robert Fizdale dans leur livre: Misia, la vie de Misia Sert font une description de "La Grangette": « Avec sa charmante façade irrégulière couverte de vigne vierge. La Grangette existe toujours parmi les grands arbres à un jet de pierre du fleuve. Elle était confortable , encombrée d'objets et un peu délabrée; cela faisait partie de son charme. Au-dessus des pièces du rez-de-chaussée, petites et plaisantes s'étendait un vaste grenier, bas de plafond, avec une superbe charpente ».

Marcel Schwob y vint rejoindre également en 1896 les "Canotiers" du Port de Valvins. André Billy dans son "Fontainebleau, délice des Poètes" précise: "il faut nommer aussi Marcel Schwob et Morion qui une saison occupèrent la charmante maison du critique musical Godebski, fils du sculpteur, elle a gardé ses vieilles tuiles, ses vieux arbres. Elle semble avoir été conservé sous globe telle qu'elle était il y a quatre vingt ans". La Moréno était la célèbre actrice Marguerite Moréno qui avait épousé le littérateur et journaliste M. Schwob.

Arnold Bennet décrivit une visite qu'il fut aux Godebski à Valvins le 29 septembre 1908 : « Pris le thé chez les Godebski.... Ida Godebska jouant du Borodine, et nous autres devant la vaste fenêtre avec le paysage de Verlaine derrière une brume de pluie; et le bruit régulier de la pluie sur des dizaines de milliers de feuilles. Mimi toute mouillée arrive, échevelée, de la forêt avec des pleins paniers de champignons... les attitudes et les gestes d'une exquise perfection de Mimi jouant avec les chiens ». Marie Blacques-Belaire a été enterrée dans le Cimetière de Samoreau.

Il ne reste que peu de chose aujourd'hui à Valvins de 1898; le port garde encore quelques traces de son ancienne activité, le vieux pont a disparu, la maison de Mallarmé a été bombardée pendant la Libération en 1944, pourtant à travers quelques écrits on peut imaginer de ce que fut la vie sociale et économique de ce petit hameau :

"Le Moulin de la Galette" ou Moulin de Valvins, du Rû, de la chaudière, sur le rû Changis près Valvins. C'était un ancien moulin à farine qui avait appartenu vers 1840 à un certain Louis Lecoq et qui fut transformé en scierie hydraulique à la fin du Second Empire.

"Au Moulin de la Galette". Cette guinguette, pour matelote et friture, qui avait été installée dans les dépendances du Moulin de Valvins par le fondateur du "Lapin court", n'eut pas beaucoup de succès.

L'Auberge de Valvins, au bord de la Seine, près du Pont de Valvins. C'est sous ce nom qu'on désignait autrefois l'auberge exploitée par M. Henet Villaret dans le hameau de Valvins. Cette auberge, à proximité du port, fut sans doute la première construction édifiée dans ce lieu, elle figure déjà dans la carte de Guilbert en 1731.

Il était d'usage d'aller à l'auberge de Valvins manger une matelote faite avec le poisson que l'aubergiste prenait dans la Seine suivant les besoins de la consommation. Cette Maison était aussi communément connue sous le nom de "Petit Pierre"; ce dernier ayant dirigé longtemps cet établissement.

Aujourd'hui la maison de Mallarmé est devenue un musée départemental et "La Grangette" s'étiole en oubliant les mânes de Thadée et de Misia.

Frédéric VIEY
* Annette Natanson-Vaillant était la fille d'Alfred Natanson et de Marthe Bellot.

** Geneviève Halévy, fille du Compositeur Fromenthal Halévy, se maria avec Georges Bizet dont elle eut un fils; Jacques. Elle épousa en secondes noces le banquier Strauss.

*** Julie Manet, fille de Berthe Morisot, fut l'élève du Violoniste Jules Boucherit. Jules Boucherit a reçu la Médaille des Justes décernée par l'Etat d'Israël pour avoir sauvé ses élèves juifs dans sa maison de Bourron-Marlotte.

Les Grandes heures de Valvins par Frédéric VIEY

 


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