ALEX DU PREL
un homme hors du commun

Alex du Prel

Alex du Prel est un personnage hors du commun, sa vie aventureuse peu banale. Né à Vienne (Autriche) en 1944, il est citoyen américain et a pris la nationalité française en 1983.

Homme libre, curieux de tout, Alex du Prel, est avide de tout connaître.

Ingénieur de formation, il a bourlingué à travers le monde, parcouru l'Europe, les États-Unis, l'Amérique Latine notamment les Caraïbes. Il parle six langues, écrit couramment l'anglais, le français et l'allemand.

Comme il le dit lui-même : « Pour garder ma liberté de mouvement, j'ai exercé une multitude de métiers: géomètre, maître d'hôtel, soudeur, interprète, marin, ingénieur, botaniste, régisseur de plantation, directeur d'hôtel, acteur de cinéma, mécanicien itinérant, convoyeur de bateaux, cuisinier, professeur de langues, chef de chantier, journaliste, conseiller économique pour le gouvernement... en fait je suis un autodidacte polyvalent ! ».

Au début des années 70, il se fait plaisir en construisant un voilier à coque en béton armé, long de 12 mètres. Il réalise à son bord une traversée du Pacifique en solitaire qui modifie le cours de sa destinée: il abandonne tout esprit de carrière pour privilégier les rencontres humaines. Il s'intéresse et se passionne pour les civilisations polynésiennes, leur protection et prend à cœur et à poigne la défense des peuples et cultures en péril.

Durant plusieurs années Alex du Prel parcourt la polynésie d'île en île, d'atoll en atoll à bord de son navire transformé en atelier flottant. Dès qu'il paraît, les autochtones lui apportent leurs appareils tombés en panne, des machines à réparer, des moteurs à ressusciter. Habile de ses dix doigts, usant de son intelligence et de son bon sens, Alex sait tout faire, même ce qu'il n'a jamais appris. Il démonte et remet en marche les radios, les machines à coudre, les montres, des appareils déjà cent fois rafistolés. Il soigne aussi les bobos, les foulures, les fractures mal remises. En véritable empirique, il connaît les plantes qui guérissent. Les polynésiens n'ayant guère d'argent lui apportent en échange de ses services des vivres frais, le produit de leur pêche, des fruits, de la nacre, des perles. Ils l'invitent à leurs fêtes, lui apprennent leurs chants, lui content les belles légendes de leur univers paradisiaque. Avide de savoir, du Prel s'intéresse à leur histoire, à leurs traditions, à leurs savoir-faire, à leur langage.

Après avoir travaillé quelque temps pour Marlon Brando dans son atoll de Tetiaora, Alex du Prel crée le Yacht club de Bora Bora, devient hôtelier, puis, en 1982, pose enfin sac à terre à Moorea. Là il trouve l'amour dans le vallon enchanteur de Pao Pao, au-dessus de la Baie de Cook.

Il vend son voilier à des représentants locaux de la secte des Extra-terrestres qui, lors de leur première sortie, échouent le bâtiment sur un récif où, la coque éventrée, il coule en quelques instants.

«J'aimais mon bateau qui me le rendait bien. Plutôt que de nous séparer, il préféra se saborder !»

Alex du Prel épouse sa vahiné dont il aménage le faré et le vaste domaine familial en friche, le mettant en valeur selon ses idées.

Ce fut là, qu'en 1987 avec Carole, je fis la connaissance d'Alex du Prel, de son épouse et de leur ravissante fille Poema, lors de notre voyage en Polynésie.

Nous avons passé quelques heures exquises dans son faré, à visiter le domaine, à l'écouter parler avec enthousiasme et une certaine nostalgie de ce paradis terrestre qui allait disparaître happé par le monde moderne et la bureaucratie.

Fare
Opuhi Plantation

Comme je l'encourageais vivement à écrire tout cela, il me confia le pemier jet d'un récit vécu: Teiki, une histoire touchante, illustrant fort bien la fin de ce monde libre envahi par la bêtise.

Alex nous montra ensuite sa plantation d'ananas, ses badamiers, ses bananiers, ses haihai, ses urus (arbre à pain), ses acajous (swietenia magahoni) qui grandissaient avec exubérance parmi les essences indigènes, arbres nobles auxquels l'incurie ou l'incompétence des officiels préférait les pins d'Alep ou le miconia importés proliférant au détriment des plantes indigènes, sans grande utilité pour ces contrées.

Nous avons visité son magnifique verger, sa fruiterie, sa conserverie moderne lui permettant d'alimenter les hôtels de Tahiti et de Moorea en jus frais d'ananas, de mangue, de goyave, en laitages alors que jusqu'à présent tous ces produits étaient importés à grand frais de Nouvelle-Zélande ou de la métropole par les commerçants chinois.

Par la suite, pour défendre et répandre ses idées, Alex du Prel deviendra journaliste. Ardent défenseur de la nature, des autochtones, il luttera par le verbe et la plume contre les aberrations politiques et écologiques des gouvernements corrompus mis en place par le pouvoir colonial, publiant pour le plaisir, entre deux brûlots, de délicieux ouvrages témoignant de ce monde fragile et magnifique appelé à disparaître.

En 1991, il fonde Tahiti-PacificMagazine qui, diffusé à environ 4.000 exemplaires, restera le seul mensuel d'information francophone indépendant du Pacifique. Du Prel s'entoure d'une rédaction de qualité, d'hommes et de femmes libres, non inféodés à un parti ou à une idéologie. Qu'ils soient français, américains ou australiens ce sont des spécialistes compétents dans leur domaine, aux idées claires. Ils trouvent dans cette publication un espace de réflexion et de liberté de parole que ne leur offrent pas les quotidiens du groupe Hersant diffusés en Polynésie. Mais cette liberté a un prix. Et Alex du Prel la paiera de ses deniers, au prix fort. Interdit d'antenne à RFO, il subit plusieurs procès qu'il gagne souvent contre de plus puissants que lui. Les articles de Tahiti-Pacifique Magazine sont repris par Le Monde, Le Canard Enchaîné et d'autres publications indépendantes.

Ses recueils de nouvelles, "Le bleu qui fait mal aux yeux" et "Paradis en folie" rencontrent un joli succès auprès d'un public lettré mais sont peu connus des autochtones.

Dès la fin du XXe siècle, l'Internet permet à Alex du Prel de diriger son journal depuis son faré de Moorea, gagnant du temps tout en conservant une qualité de vie exceptionnelle.

La messagerie lui permet de rester en contact permanent avec ses rédacteurs, ses informateurs et ses lecteurs. Un site agréable présente sa revue sur la Toile offrant à tous la possibilité de lire des articles complets, de tisser des liens vers des pages amies, de découvrir les œuvres des artistes qu'il aime et de les promouvoir.

Et, cerise sur le gâteau, depuis le 15 août 2010, la rédaction du magazine Tahiti Pacifique, perdue dans la jungle de Moorea, est alimentée à 100% en énergies renouvelables. Tahiti-PacificMagazine média écologique

Quand on l'interroge sur les nouvelles technologies de l'information et de la communication, Alex du Prel est intarissable :

« Pour des îles isolées comme les nôtres, l'Internet est une véritable révolution. Elle rend l'information accessible dans les deux sens jusque dans l'atoll le plus isolé. Et pour nous, journalistes, les informations viennent de partout, en temps réel, des médias, des experts, des simples citoyens du monde entier. L'individu isolé est à la fois informé et informateur.

A nous donc de faire en sorte que la civilisation du tout numérique soit libératrice et catalyse ce qu'il y a de meilleur dans l'individu et notre culture. Par contre, une question essentielle, se pose : les Polynésiens, et pas seulement ceux des îles qui vivent encore dans une civilisation orale, vont-ils profiter de la fenêtre qui leur est ouverte ? Rares encore sont ceux qui lisent un livre (hormis la Bible), un journal dont ne les intéressent que les images.

Abrutis par une télévision débile, liront-ils davantage sur un écran d'ordinateur ? Rien n'est moins sûr. Il faudra donc sans doute une ou deux générations d'éducation à l'occidentale pour vraiment intégrer la population de nos îles au monde moderne qui éblouit tant nos dirigeants. Mais alors, que restera-t-il de notre fragile culture chez ces élites abâtardies ? »

J'avais perdu de vue Alex du Prel depuis des lustres et ne l'avais jamais revu. Je viens seulement de l'apprendre (été 2011), il souhaiterait "passer le manche" de sa magnifique revue que je recevais fidèlement, une ou deux fois par an, en souvenir de l'une des plus belles journées de ma vie.

Quant à Poema, sa fille devenue photographe, elle parcourt le monde camera au poing.

Salut Alex ! tu restes pour nous une figure d'exception, un Seigneur de ce monde, et si, lors d'une escapade, tu passais par la France, ne manque pas de venir nous voir !

Marc Schweizer
Livres d'Alex du Prel :
Le Bleu qui fait mal aux yeux
Le Paradis en folie

Baie de cook
Moorea : Baie de Cook
Teiki, une nouvelle d'Alex du Prel

 
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